Job 16 - vous êtes tous d’insupportables consolateurs ()
Alors Job prit la parole et dit :
J’ai souvent entendu de semblables harangues ; vous êtes tous d’insupportables consolateurs.
Quand finiront ces vains discours ? Quel aiguillon t’excite à répliquer ?
Moi aussi, je saurais parler comme vous, si vous étiez à ma place ; j’arrangerais de beaux discours à votre adresse, je secouerais la tête sur vous ;
je vous encouragerais de la bouche, et vous auriez pour soulagement l’agitation de mes lèvres.
Si je parle, ma douleur n’est pas adoucie ; si je me tais, en est-elle soulagée ?
Aujourd’hui, hélas ! Dieu a épuisé mes forces... ô Dieu, tu as moissonné tous mes proches.
Tu me garrottes... c’est un témoignage contre moi !... ma maigreur se lève contre moi, en face elle m’accuse.
Sa colère me déchire et me poursuit, il grince des dents contre moi ; mon ennemi darde sur moi ses regards.
Ils ouvrent leur bouche pour me dévorer, ils me frappent la joue avec outrage, ils se liguent tous ensemble pour me perdre.
Dieu m’a livré au pervers, il m’a jeté entre les mains des méchants.
J’étais en paix, et il m’a secoué, il m’a saisi par la nuque, et il m’a brisé. Il m’a posé en but à ses traits,
ses flèches volent autour de moi ; il perce mes flancs sans pitié, il répand mes entrailles sur la terre ;
il me fait brèche sur brèche, il fond sur moi comme un géant.
J’ai cousu un sac sur ma peau, et j’ai roulé mon front dans la poussière.
Mon visage est tout rouge de larmes, et l’ombre de la mort s’étend sur mes paupières,
quoiqu’il n’y ait pas d’iniquités dans mes mains, et que ma prière soit pure.
O terre, ne couvre point mon sang, et que mes cris s’élèvent librement !
A cette heure même, voici que j’ai mon témoin dans le ciel, mon défenseur dans les hauts lieux.
Mes amis se moquent de moi, c’est vers Dieu que pleurent mes yeux.
Qu’il juge lui-même entre Dieu et l’homme, entre le fils de l’homme et son semblable !
Car les années qui me sont comptés s’écoulent, et j’entre dans un sentier d’où je ne reviendrai pas.