RAQQA, l ombre de Daech, Hélène Lam-Trong (doc)@@ ()
Comment les Raqqaouis en Syrie vivent-ils l’heure de la reconstruction de leur ville rasée à 80 % ? Un beau portrait amer, à travers les mots des habitants.
TELERAMA
Une promenade en bateau, un barbecue… De prime abord, la vie « normale » est revenue à Raqqa, jadis connue pour sa douceur de vivre et sa prospérité. Hélène Lam Trong, Prix Albert-Londres 2023 pour Daech, les enfants fantômes, est retournée à Raqqa en avril 2024, espérant que la capitale du califat de 2014 à 2017, laboratoire des attentats parisiens et symbole de la terreur aux yeux du monde, aurait réussi le pari de sa reconstruction. Loin de s’améliorer, la situation a empiré pour sa population, victime du régime de Bachar el-Assad, des terroristes de Daech et, à un niveau différent, de l’abandon de la communauté internationale.
La libération de Raqqa a eu lieu, mais à quel prix ? La ville a été rasée à 80 % lors des bombardements par les forces de la coalition internationale. Un champ de ruines qui a poussé les habitants à fuir ou à se réfugier dans des camps. « Comment avons-nous libéré le monde du terrorisme ? Avec le sang des nôtres », résume un témoin. Pauvreté extrême, absence de structures : toute une génération d’enfants erre dans les rues. Une grande partie de l’aide humanitaire n’arrive jamais, confisquée par la dictature d’Assad. Dans ce terreau amer grandit un risque que le film décrypte à travers maints exemples : le retour de l’État islamique. Des combattants de Daech infiltrés dans la ville (cinq mille djihadistes, selon les Américains) agiraient au sein de cellules dormantes. « L’idéologie de Daech persiste, la guerre n’est pas terminée », dit une responsable kurde. Derrière les très belles images signées Bernard Jallet, sans jamais jouer sur de fausses peurs, une réalité et une responsabilité à appréhender dès aujourd’hui. Ce film nous aura prévenus.