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lundi 25 novembre 2024 - 12h44rech / rep
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LES OLYMPIADES, Jacques Audiard 2021, Lucie Zhang, Makita Samba, Noemie Merlant (societe)@@
(taille reelle) (grd ecran)


Paris 13e, quartier des Olympiades. Emilie rencontre Camille, qui est attiré par Nora, qui elle-même croise le chemin de Amber. Trois filles et un garçon. Ils sont amis, parfois amants, souvent les deux.

TELERAMA
Jacques Audiard signe une comédie voluptueuse doublée d’un conte moral, à l’esprit Nouvelle Vague.
Fini la malédiction de la violence. La douceur a pris le relais, et même ses aises, à l’image de cette jeune odalisque nue et détendue, qui chante micro à la main sur son canapé, à côté de son amant. C’est le prologue des Olympiades, comédie voluptueuse doublée d’un conte moral. Soit un sacré virage dans la carrière de l’auteur du Prophète et des Frères Sisters, la collaboration au scénario de Céline Sciamma et Léa Mysius (réalisatrice d’Ava et scénariste de Desplechin) expliquant peut-être cela. Comme l’annonce le titre, le décor est le quartier géométrique des Olympiades, dans le 13e arrondissement de Paris, avec ses tours, autour desquelles la caméra plane. Derrière chaque fenêtre, des personnes vivent, font l’amour, se sentent seules, espèrent. Le film en élit quatre, dont il entrecroise les destins. Ce sont de jeunes adultes. Trois filles et un garçon, cultivés mais pas installés. Qui se cherchent en cherchant l’amour.

La première qui émerge est la chanteuse, Émilie (Lucie Zhang). Une jolie Franco-Chinoise vive et sagace, qui a fait Science-Po mais se coltine un boulot pénible de vendeuse dans un centre d’appels. Elle a mis une annonce pour partager son appartement avec une colocataire. Mais c’est un Camille au masculin qui se présente (Makita Samba), prof de lycée. Elle refuse le candidat, se ravise puis passe rapidement au lit avec lui. Libres, décomplexés, Émilie et Camille sont du genre à coucher d’abord et à discuter ensuite. Le sexe, la séduction et le discours amoureux, voilà l’attrait de ce marivaudage, qui propose une forme de sensualité neuve. Un érotisme qui se glisse autant dans les dialogues que dans les scènes d’amour stricto sensu, charnelles mais aussi très pensées, chorégraphiées, différentes… Pour Nora (Noémie Merlant), le désir et le plaisir vont moins de soi. Cette jeune provinciale, un peu naïve et burlesque, qui travaillait dans l’immobilier à Bordeaux, a décidé de reprendre des études, à la fac de Tolbiac. À peine arrivée, elle est victime de cyberharcèlement à la suite d’une méprise. Elle retrouve Amber Sweet, la fille blonde (Jehnny Beth), prostituée à distance sur le Net, avec laquelle on l’a confondue. En ligne, toutes deux entament un dialogue, régulier, sans caractère sexuel, où chacune se livre, raconte ses expériences vécues. Des affinités affleurent.

À travers ce quatuor de personnages, Jacques Audiard dessine avec beaucoup d’élégance une carte du tendre, contemporaine et atemporelle. Il y a quelque chose d’aérien et de fluide dans sa manière de passer d’un protagoniste à l’autre, de l’amitié à l’amour, sans se départir d’un ancrage social précis, à savoir le quotidien multiracial du Paris d’aujourd’hui. Le film parle de sentiments mais parvient aussi, sans s’appesantir, à évoquer les galères de travail et de logement, le rôle de l’entourage. Par petites touches, il saisit les liens d’Émilie avec sa mère, sa grand-mère et la communauté chinoise. Idem du côté de Camille, dont la petite sœur arrive à surmonter son problème de bégaiement grâce au stand-up.

De l’humour, il y en a. Une tournure d’esprit que les quatre comédiens offrent avec une fraîcheur confondante, faisant rimer légèreté, sex-appeal, intelligence sensible. Il est d’ailleurs troublant qu’à travers eux, via le noir et blanc satiné et les intrigues de cœur, Les Olympiades rappelle l’esprit d’une famille qui semblait éloignée de Jacques Audiard : celle de la Nouvelle Vague. On a cru un instant reconnaître Delphine Seyrig en Noémie Merlant, on a pensé à Rohmer et Truffaut. Le film se termine sur un évanouissement digne de La Femme d’à côté ou de Stendhal. Autant dire que le romantisme n’est pas mort.