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FEMMES DE LA TERRE



FEMMES DE LA TERRE
(taille reelle)
FEMMES DE LA TERRE, Édouard Bergeon ()
Femmes de la terre aborde le rôle primordial des femmes dans l’agriculture à travers trois axes : le portrait de la famille Picard, que le réalisateur suit depuis longtemps, éleveuse de vaches dans la Meuse sur trois générations, la parole de trois agricultrices retraitées qui se sont battues pour leurs droits et l’évolution de leur statut, et enfin trois éleveuses trentenaires, symboles de l’avenir de la ruralité française.

TELERAMA
Ambitieux programme auquel il faut ajouter une dimension personnelle et intime : fils de paysan, producteur et réalisateur de documentaires (Les Fils de la terre, L’Amour vache…) et de fiction (Au nom de la terre, 2019), Édouard Bergeon a grandi et travaillé à la ferme jusqu’à ses 20 ans, dans « un monde d’hommes, un monde rude, taiseux ». S’appuyant sur sa légitimité incontestable dans ce milieu, après avoir raconté le drame familial – le suicide de son père, Christian, en 1999 –, il veut aujourd’hui rendre hommage à sa mère agricultrice, qui a vécu dans l’ombre et « tenu la famille et la ferme dans les moments de joie comme dans les plus difficiles ». Et poursuit-il dans sa note d’intention, « raconter l’histoire de toutes “les femmes de la terre” qui, aux côtés de leurs hommes, ont travaillé durement pour nourrir la France et en faire une grande nation agricole, souvent au détriment de leur santé et de leurs droits ».

Jeannette Gros (en haut) et Anne-Marie Crolais (en bas). Deux agricultrices engagées dans la vie mutualiste et syndicale.
Jeannette Gros (en haut) et Anne-Marie Crolais (en bas). Deux agricultrices engagées dans la vie mutualiste et syndicale. Bien media/Babel doc

En mêlant témoignages et archives, ce documentaire retrace donc le parcours de générations de femmes agricultrices qui ont littéralement porté ces exploitations sans relâche, dans l’invisibilité la plus totale. Combien d’entre elles se sont retrouvées sans retraite parce que leurs décennies de labeur n’apparaissaient dans nulle comptabilité aux yeux de l’administration ? Par les hasards de la vie – un veuvage, une révolte intérieure… –, certaines sont montées au créneau, pour que naissent enfin leurs droits (en matière de sécurité sociale, d’assurances en cas d’accidents du travail…). Passant de l’ombre à la lumière, montant à Paris comme à Bruxelles, sur les plateaux de télé, face aux ministres et autres décideurs, elles ont tout osé, essuyé doutes et moqueries (franchement, de simples paysannes sorties de leur cambrousse…) et obtenu une reconnaissance tardive mais essentielle. Formidables et émouvants témoignages de Jeannette Gros, 81 ans, qui devint présidente nationale de la Mutualité sociale agricole (Doubs), tout comme celui d’Anne-Marie Crolais, 72 ans, agricultrice retraitée et ancienne syndicaliste (Côtes-d’Armor).

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Après les récits très clairs et incarnés de ces dernières, il est plus difficile de suivre le positionnement des autres intervenants : très présent à l’écran et s’exprimant à la première personne, Édouard Bergeon continue de dresser des parallèles entre ses souvenirs familiaux et la situation actuelle. En quelques décennies, la donne a changé : avec des revenus qui s’effondrent (– 40 % en trente ans), face à la puissance de l’agrobusiness et de Bruxelles, les agriculteurs – surendettés – sont accusés de « polluer la terre ». Pour autant, le propos se veut positif avec Claire Gervais, 29 ans, éleveuse de vaches laitières, Anne-Cécile Suzanne, 33 ans, éleveuse de blondes d’Aquitaine, et Lucie Mainard, 36 ans, éleveuse de poules pondeuses bio. Toutes ont plusieurs « casquettes agroalimentaires » : influenceuses, cheffes d’entreprise, consultante en cabinet de conseil en stratégie, administratrice de coopérative agricole… Mais bien qu’elles « ne se fixent aucune limite », elles restent confrontées à une forme de machisme et de sexisme. Pour accéder à l’égalité, « y a encore du boulot »…