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royer (pancrace) - vertigo pour clavecin 1746@
le compositeur mêle habilement pièces poétiques, douces à souhait (L’Aimable, Les tendres sentiments, La Sensible), aux fureurs d’une écriture plus lyrique qui, soit reprend à son compte des thèmes déjà rencontrés dans ses propres œuvres scéniques (La marche des Scythes, La Zaïde, Les Matelots, Allemande), soit va au-delà des pures moments descriptifs en usant d’une virtuosité nouvelle (Le Vertigo).


Louise Geneviève Le Blond, Madame Royer. Copie d'après un pastel de Jean-Marc Nattier. Coll. priv.
D’une manière générale, l’on peut dire que Royer accorde une plus grande place que ses prédécesseurs au chant dans ses pièces, ce qui n’est pas un hasard au vu de sa production vocale. Le succès d’adaptations, plus que de transcriptions, comme La Zaïde (Acte V, scène 5, prélude au quatuor « Ah ! quel bien suprême » du ballet Zaïde, reine de Grenade) n’est donc pas étonnant, surtout si l’on jette un regard intéressé aux nombreux Recueils d’airs de différents auteurs mis pour d’autres instruments en vogue, comme la flûte traversière par le célèbre Michel Blavet : les thèmes issus d’ouvrages de Royer y sont légion !Royer, dépassant la simple décalcomanie d’un air, traite avec une certaine liberté le thème initial et réinvente sans cesse sa pensée. Les Matelots, issus du ballet héroïque, Le Pouvoir de l’Amour, correspondent ainsi à l’Entrée pour les habitans du Pactole de l’Acte II. De même, Les tambourins, issus du même acte, font-ils écho à l’Allemande tirée de l’acte III, scène II où elle faisait initialement office de Marche pour le Sacrifice. La Marche des Scythes, enfin, morceau de pure bravoure issu d’un simple Air pour les Turcs en rondeau (Zaïde, Acte V, scène v) propose à l’exécutant des variations dont Royer prend soin d’expliquer la « façon d’arpéger ».

Ces quelques pièces, rappelant fidèlement de grands moments d’émotion scéniques, ne font cependant pas oublier les autres morceaux purement sensibles qui montrent l’étendue du génie de Royer. S’attachant à rendre fidèlement une émotion ou un caractère de l’âme humaine (La Majestueuse avec ses rythmes, L’incertaine et ses passages de l’aigu désenchanté au grave le plus ténébreux), l’auteur atteint sans doute le paroxysme de l’émotion dans L’Aimable, douce ballade triste et résignée aux accents déchirants s’abîmant dans le grave d’un registre qui ne semble pourtant pas céder la place au désespoir. L’ensemble nous fera alors regretter qu’un second « Livre de Clavecin » n’ait pu voir le jour, livre dont le contenu, resté probablement en possession de Louise Geneviève Le Blond (veuve de Royer qui reprit la gestion du Concert Spirituel avec Mondonville après 1755), semble à jamais perdu…