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schumann (robert) - quintette pour piano et cordes martha argerich (classique piano cordes) 1845
Composé par Robert Schumann pendant cette année 1842 qui a lui été si féconde, le quintette pour piano et cordes en mi bémol majeur est l’une des expressions les plus abouties du romantisme musical. On y trouve dans chaque mouvement, mêlés avec un égal bonheur, les emportements conquérants de Florestan et la tendre rêverie d’Eusebius. Réunir un quatuor à cordes et un piano peut sembler évident aujourd’hui, tant cette formation musicale a suscité de chefs d’œuvre, mais cela constituait à l’époque une grande première, et Schumann, qui est le véritable créateur du genre, précède Brahms et Dvorak respectivement de 23 et 30 ans !

L’œuvre est en quatre mouvements, disposés traditionnellement : vif, lent, scherzo, vif.

Allegro brillante. Brillant, en effet, ce premier thème volontaire martelé forte par les cinq instrumentistes est immédiatement repris et varié par le piano, puis en imitations libres par les cordes, dans la nuance piano. Les deux faces psychologiques de Schumann évoquées plus haut s’opposent donc d’entrée de jeu. Pendant toute l’exposition, le discours musical se poursuit dans le même esprit, avec une grande richesse d’inspiration et une vitalité débordante.

Soudain tout s’arrête : le développement débute abruptement par une quasi-citation de la plainte ouvrant l’aria « Es ist vollbracht » de la passion selon Saint Jean de J.S. Bach : une gamme descendante, présentée trois fois par le piano, à peine soutenue à l’unisson par un instrument du quatuor. Mais cette ombre passagère est vite dissipée : le thème « brillant » surgit et introduit un merveilleux développement en deux parties où les cordes, en valeurs longues, sont soutenues par les croches volubiles du piano. Après une réexposition régulière, le mouvement se conclut par une brillante coda.

In modo d’una marcia. Un poco largamente. Ce mouvement est de forme ABACA’BA. Le début (A) reste gravé dans la mémoire. Après un bref arpège descendant du piano, nous entendons une mélodie désolée, hachée de silences expressifs, « à la manière d’une marche ». Est-elle « funèbre » ? Cette appréciation, bien qu’elle vienne spontanément à l’esprit, n’est pas marquée sur la partition. Une section (B), d’un contraste absolu, fait entendre une admirable mélodie en valeurs longues, à la fois tendre et implorante, confiée au premier violon.
La reprise à l’identique de (A) débouche cette fois sur un rappel de l’aria de Bach, au piano, qui lance l’épisode central agitato (C), furieux et dramatique. Une reprise variée (A’) de la marche s’enchaîne sans transition, dans le même mouvement et avec la même charge émotionnelle. Car cette fois le thème, confié à l’alto seul, est soutenu par un accompagnement passionné des autres instruments. Après une reprise de l’épisode (B), le mouvement se conclut par la marche sous sa forme originelle.

Scherzo. Molto vivace, de forme scherzo – trio 1 – scherzo – trio 2 – scherzo. Après le climat oppressant de la marche funèbre, ce scherzo vient à propos nous libérer de ces angoisses. Son matériel thématique est rudimentaire : de simples gammes ! Mais une subtile articulation rythmique, faite de syncopes et d’accents sur les temps faibles, crée un dynamisme irrésistible. Cette musique, tendue comme une flèche, contraste avec les deux trios : le premier, un canon sur une tendre mélodie qui tourne sur elle-même, inlassablement répétée, et le second, fébrile, avec ses doubles croches qui piétinent rageusement.

Allegro ma non troppo. Ce magnifique finale, d’une débordante invention, est l’aboutissement de ce chef d’œuvre et le couronne avec brio. La forme de rondo (refrain + couplets) est d’une simplicité apparente. Schumann donne libre cours à son imagination mélodique et à sa science du contrepoint, comme l’attestent de nombreux passages en style fugué. Le plus spectaculaire vient après un grand point d’orgue, très théâtral, qui donne le coup d’envoi d’une fugue magistrale où se mêlent le « refrain » et le thème brillant du premier mouvement. Le compositeur montre ainsi son souci de donner une cohésion thématique à son œuvre.

Le Quintette pour piano en mi bémol majeur, op. 44 de Robert Schumann a été composé en septembre et octobre 1842. Comme la plupart des quintettes pour piano, il est écrit pour piano et quatuor à cordes (deux violons, alto et violoncelle). Il fut créé le 8 janvier 1843 par des musiciens du Gewandhaus et Clara Schumann au piano. Wagner s'en montra fort enthousiaste : « Votre quintette, très cher Schumann m′a beaucoup plu […] je vois quel chemin vous voulez suivre, c′est aussi le mien, là est l′unique chance de salut ». Berlioz et Liszt furent plus réservés à son égard. Chef-d'œuvre romantique du genre, ce modèle sera adopté par la suite par Brahms, DvoÅ™ák, Tchaïkovski et César Franck.