37,2 DEGRES LE MATIN, Jean-Jacques Beneix 1986, Beatrice Dalle, Jean-Luc Anglade@Zorg, 35 ans, employé au gardiennage dans un village de bungalows en bord de mer, rencontre Betty, une jeune femme pulpeuse qui s'installe bientôt chez lui. Son patron n'est pas content mais finit pas accepter la nouvelle venue à condition qu'elle aide Zorg à repeindre les 500 bungalows. TELERAMA: Ce film-phénomène adapté du roman de Philippe Djian fit vibrer une génération. Trop rose, trop jaune, trop pub, trop cru, le style Beineix ? Étirées, certaines scènes d’ivresse, d’hilarité ou d’hystérie ? Plutôt en accord avec la démesure des sentiments, avec la bouche de Béatrice Dalle, son talent primitif et explosif, et avec la fébrilité magnifique de Jean-Hugues Anglade. Plus de trente ans après, cela redevient clair comme le ciel de la station balnéaire où se forme le couple fusionnel : 37 ° 2 le matin est un opéra romantique, un Roméo et Juliette où l’amour se fait à poil, où les romanciers sont incompris, et les filles vulgaires des idéalistes qui croient qu’il suffit d’aimer à la folie. Zorg, 35 ans, employé au gardiennage dans un village de bungalows en bord de mer, rencontre Betty, une jeune femme pulpeuse qui s'installe bientôt chez lui. Son patron ... |
47 METERS DOWN, Johannes Roberts 2017 (drame mer)@Après la rupture de Lisa, sa soeur Kate l'embarque en vacances au Mexique pour lui changer les idées. Avides d'aventures, elles se mettent au défi de plonger parmi les requins blancs, protégées par une cage. Une fois dans l'eau, le spectacle est incroyable, mais subitement, le câble qui retient la cage au bateau cède, et les deux soeurs se retrouvent plongées au fond de l'océan, à 47 mètres de profondeur. Il ne reste qu'une heure d'oxygène et les grands blancs rôdent. TELERAMA Une fois qu’on plonge dans les profondeurs avec ses héroïnes, le film remplit son contrat : faire peur. Dans les abysses, personne ne vous entend crier… Les requins sont une espèce menacée dans tous les océans du globe. Mais ce n’est pas ce survival en milieu sous-marin qui va donner envie de les sauver… Une jolie Américaine délurée a emmené sa sœur plus introvertie se changer les idées sur une plage du Mexique. Après quelques verres de téquila, elles se laissent convaincre par deux beaux gosses locaux de s’immerger dans une cage pour aller contempler les squales de près. Évidemment, dès qu’elles mettent le pied sur le bateau qui doit les conduire au large, on se doute que la croisière ne va pas s’amuser longtemps : la cage est rouillée, les filins hors d’âge et le « captain » (le revenant Matthew Modine) ressemble à un guerrier apache qui aurait forcé sur les champignons hallucinogènes. De fait, après quelques instants sous l’eau, le câble principal casse, et les deux frangines se retrouvent coincées à 47 mètres de profondeur, avec une durée d’oxygène limitée et de grosses bébêtes affamées qui leur tournent autour… Ne pas se laisser décourager par les vingt premières minutes, épouvantablement mal écrites et mal jouées. Une fois que la caméra de Johannes Roberts plonge dans les profondeurs avec ses héroïnes, le film remplit son contrat : faire peur, en jouant à la fois sur le sentiment de solitude, la claustrophobie, l’angoisse liée à la présence invisible des prédateurs, le suspense et les effets de surprise — souvent gore, la surprise… Après la rupture de Lisa, sa soeur Kate l'embarque en vacances au Mexique pour lui changer les idées. Avides d'aventures, elles se mettent au défi de plonger p ... |
A LA DERIVE, Baltasar Kormákur 2018, Shailene Woodley, Sam Claflin (sport drame)@Avec ce long métrage qui reconstitue un accident maritime survenu en 1983, Baltasar Kormákur (“Everest”) rate le mariage entre récit de survie et mélo pour jeunes adultes. La structure du film et le jeu des acteurs sont, parmi d’autres mauvaises idées, en cause. On attendait mieux de Baltasar Kormákur, qui s’est récemment fait remarquer avec deux excellents récits de survie, l’un tourné dans son Islande natale (Survivre, 2012), l’autre à Hollywood (Everest, 2015). Il reconstitue ici l’accident d’un couple de navigateurs, surpris par un ouragan en plein océan Pacifique, en 1983. A la dérive démarre d’ailleurs sous de bons auspices, par un saisissant plan-séquence à l’intérieur d’un bateau de plaisance inondé, où décors et personnages semblent s’être liquéfiés. Le film aurait pu être une version hollywoodienne de Survivre, également inspiré d’une histoire vraie – un marin-pêcheur ayant survécu dans l’eau glacée après un naufrage. Mais, sans doute pour satisfaire un public adolescent, Kormákur saborde son film en adoptant une structure en flashbacks : on assiste, en parallèle, à l’avant et à l’après tempête. D’abord, ces retours en arrière sont extrêmement mièvres : il faut entendre la conversation du premier rendez-vous amoureux, succession de clichés sur la navigation en solitaire. Ensuite, ils diluent l’efficacité des scènes spectaculaires, y compris celle de l’ouragan, censée constituer l’acmé du film. Cette volonté de marier survival et mélo pour jeunes adultes se lit aussi dans le casting, qui réunit deux héros de dystopies adolescentes : Shailene Woodley de la saga Divergente et Sam Claflin de la franchise Hunger Games. La première a un jeu trop démonstratif, le second est transparent. Dommage… Avec une meilleure caractérisation des personnages, A la dérive aurait pu devenir la représentation, quasi littérale, des tempêtes traversées par un couple en crise. Avec ce long métrage qui reconstitue un accident maritime survenu en 1983, Baltasar Kormákur (“Everest”) rate le mariage entre récit de survie et m ... |
ALBATROS, Xavier Beauvois 2020, Jeremie Renier, Marie-Julie Maille (drame)@@Laurent, un commandant de brigade de la gendarmerie d'Etretat, prévoit de se marier avec Marie, sa compagne, mère de sa fille surnommée Poulette. Il aime son métier malgré une confrontation quotidienne avec la misère sociale. En voulant sauver un agriculteur qui menace de se suicider, il le tue. Sa vie va alors basculer. TELERAMA En 2005, Xavier Beauvois racontait les débuts d’un « bleu » de la police judiciaire dans Le Petit Lieutenant. Les forces de l’ordre inspirent décidément le cinéaste : le héros de ce film est un gendarme. Et, comme il y a seize ans, Beauvois réussit à concilier réalisme quasi documentaire et sens du romanesque, description d’un métier et développement de personnages intenses. Durant presque une heure, Albatros chronique avec brio le quotidien professionnel et intime de Laurent, commandant exemplaire de brigade à Étretat, mais, aussi, de la petite communauté normande dont il supervise la sécurité — et dont Beauvois, installé dans la région, connaît intimement les aspirations et les difficultés. Une routine faite de petites incivilités et de grands drames. Beauvois filme avec la même empathie, le même soin apporté au cadre et à l’image (superbe travail du chef opérateur Julien Hirsch), l’identification d’un suicidé qui s’est jeté de la falaise, l’adolescent sermonné parce qu’il conduit son scooter sans casque, ou encore un éleveur qui porte plainte pour le vol de ses outils avant de pleurer de rage contre les nouvelles directives européennes qui menacent son exploitation. Puis, à mi-parcours, à la suite d’une tragédie, le récit bascule dans une tout autre dimension — sur laquelle on restera évasif, tant cette rupture narrative et la surprise qu’elle provoque participent de la puissance du film. Tout juste dira-t-on qu’Albatros devient plus introspectif et plus spectaculaire, collant au corps et à l’âme brisés de Laurent (Jérémie Renier, juste et émouvant de bout en bout), mais aussi à la résilience de sa compagne, Marie (formidablement interprétée par Marie-Julie Maille, coscénariste et cheffe monteuse du film). Beauvois est, certes, moins convaincant dans cette deuxième partie qui flirte parfois avec les clichés. Mais son audace à bousculer ainsi son récit, à sortir de sa zone de confort pour prendre le large, ne manque pas de panache. Laurent, un commandant de brigade de la gendarmerie d'Etretat, prévoit de se marier avec Marie, sa compagne, mère de sa fille surnommée Poulette. Il aime son m ... |
ALL IS LOST, J.C. Chando 2013, Robert RedfordSeul au milieu de l'océan Indien, un navigateur s'accorde un peu de repos dans sa cabine lorsqu'un conteneur à la dérive percute et perfore la coque de son voilier. Malgré ses maigres ressources, l'homme parvient à colmater la brèche. Mais la radio et les instruments de navigation sont hors service et il ne peut compter sur d'éventuels secours. Bientôt, une violente tempête se lève. TELERAMA un seul personnage (Robert Redford) sur un yacht en perdition, confronté aux éléments. Ça sent, évidemment, la performance, question mise en scène et interprétation. Mais Chandor et Redford relèvent brillamment le défi : le réalisateur fait preuve d'un talent de vieux briscard. Et Redford... eh bien, c'est Redford, attachant et fragile, maître et victime des événements, inventif et dépassé : bref, magnifique. Il y a, évidemment, une part d'humour noir dans le scénario. Car enfin, dès le début, le yacht de Redford se fait empaler, une nuit, par un container égaré en pleine mer. Pas de chance. A peine a-t-il colmaté les dégâts qu'éclate une tempête. Bon. Le radeau de secours sur lequel il prend place fuit. Bien. Plus d'eau potable dans son bidon troué. La poisse ! Quant aux bateaux divers qu'il croise, ils ne le voient tout simplement pas (faut-il y voir une allégorie sur l'aveuglement du monde actuel vis à vis de l'individu ? Peut-être !). Une telle accumulation de désastres finit par provoquer le rire, mais un rire complice. L'humour du réalisateur et la sincérité de son interprète se complètent : on tremble et on sourit, c'est parfait... Au bout de ses épreuves (et Dieu sait qu'il en traverse !) Robert Redford périra-t-il dans les flots ou sera-t-il miraculeusement épargné ? Ah ça, on ne vous le dira pas... Seul au milieu de l'océan Indien, un navigateur s'accorde un peu de repos dans sa cabine lorsqu'un conteneur à la dérive percute et perfore la coque de son voi ... |
AMANTS, Nicole Garcia 2021, Pierre Niney, Stacy MartinLisa et Simon sont inséparables. Ils sont passionnés l'un par l'autre depuis leur adolescence. Une tragédie survient, provoquée par les activités criminelles de Simon. Il est en danger et s'enfuit. Sans Lisa. Elle attend en vain des nouvelles de lui. Trois ans plus tard, elle est mariée à Léo lorsque leurs chemins se croisent à nouveau sur une île de l'océan Indien. TELERAMA: La direction d’acteurs de Nicole Garcia s’avère une fois encore impeccable. Stacy Martin a tout d’une proie noyée, mélancolique, mais semble aussi détachée, protégée par une carapace. Benoît Magimel impressionne, tout en pesanteur oppressante. Pierre Niney est fiévreux, tragique à souhait. Leur partition cisèle à merveille ce diamant noir. Lisa et Simon sont inséparables. Ils sont passionnés l'un par l'autre depuis leur adolescence. Une tragédie survient, provoquée par les activités ... |
AU NOM DE LA TERRE, Edouard Bergeon, Guillaume Canet (drame)@@Pierre a 25 ans quand il rentre du Wyoming pour retrouver Claire sa fiancée et reprendre la ferme familiale. Vingt ans plus tard, l'exploitation s'est agrandie, la famille aussi. C'est le temps des jours heureux, du moins au début. Les dettes s'accumulent et Pierre s'épuise au travail. Malgré l'amour de sa femme et ses enfants, il sombre peu à peu. TELERAMA Les images de l’élevage intensif de poulets dans lequel s’embourbe Pierre Jarjeau, agriculteur surendetté et épuisé, provoquent un électrochoc chez les spectateurs. Au nom de la terre est inspiré de l’histoire de Christian Bergeon. Son fils, le réalisateur Édouard Bergeon, l’a vu mourir après une longue descente aux enfers et l’ingestion de glyphosate, entre autres pesticides, dans un cocktail fatal. Pierre a 25 ans quand il rentre du Wyoming pour retrouver Claire sa fiancée et reprendre la ferme familiale. Vingt ans plus tard, l'exploitation s'est agrandie, la famille a ... |
AUSSI PROFOND QUE L OCEAN, Ulu Grosbard 1999, Michelle PfeifferBeth est photographe et mène une vie heureuse avec ses enfants et son mari. Mais, lorsque celle-ci se rend avec sa famille à une réunion d'anciens camarades de lycée, quelques minutes d'inattention suffisent à faire basculer sa vie. Son fils de trois ans, Ben, disparaît. Près de dix ans plus tard, alors que le foyer de Beth tente désespérément de survivre à cette terrible épreuve, un jeune garçon vient frapper à sa porte. TELERAMA La vie de Beth Cappadora a basculé dans l'angoisse quand son fils de trois ans, Ben, a subitement disparu dans le hall d'un grand hôtel de Chicago. Les multiples enquêtes et recherches n'ont jamais abouti. Le cauchemar de la famille Cappadora prend fin dix ans plus tard, lorsque Ben, qui répond maintenant au prénom de Sam, frappe à la porte du domicile familial. La surprise est de taille. La comparaison des empreintes digitales ne laisse aucune place au doute : Sam et Ben ne font qu'un. Une nouvelle enquête révèle que l'enfant a été kidnappé par une ancienne camarade de classe de Beth, mariée puis décédée. Mais ces retrouvailles provoquent des déchirements au sein de la famille... Beth est photographe et mène une vie heureuse avec ses enfants et son mari. Mais, lorsque celle-ci se rend avec sa famille à une réunion d'anciens camarades de ... |
BARBARA, Christian Petzold 2012, Nina Hoss, Ronald Zehrfeld @@@En RDA, une chirurgienne-pédiatre est mutée par les autorités dans une clinique de province au milieu de nulle part. TELERAMA Tout en elle émeut, tout de suite. Sa beauté. Sa colère rentrée, sa tristesse mal dissimulée. Tout en elle intrigue, sitôt qu’elle apparaît. Barbara, chirurgienne pédiatre, débarque dans un coin paumé de l’Allemagne de l’Est, en 1980. Nommée là parce qu’elle était soupçonnée, à Berlin, de vouloir passer à l’Ouest… Avec cette femme, le réalisateur allemand Christian Petzold retrouve sa première actrice fétiche, la remarquable Nina Hoss, et raconte avec elle une époque sombre de leur pays. Dans cette Allemagne de l’Est finissante, dont Barbara est la belle captive, tous les lieux, choisis avec un sens évocateur magistral, distillent une atmosphère menaçante. Il y résonne une vacuité absurde et la peur que le moindre geste soit vu, dénoncé. Rien ne doit déranger l’ordre immobile. Tout ce que fait Barbara, dès lors, devient signe. Ses trajets à vélo. L’attention qu’elle refuse de porter à un collègue qui, lui, la regarde. Aux yeux de cet homme, Barbara devient fascinante. Comme elle l’est pour l’agent local de la Stasi. Et pour nous. Elle est le mystère d’une grâce qui persiste, d’une liberté qui résistera peut-être. Un beau suspense. En RDA, une chirurgienne-pédiatre est mutée par les autorités dans une clinique de province au milieu de nulle part. TELERAMA Tout en elle é ... |
BODYGUARD, Mick Jackson 1992,Kevin Costner, Whitney Houston (drame sentimental)@@@Frank Farmer, ancien agent des services secrets, est un garde du corps émérite qui a mis ses talents à la disposition de deux présidents et de nombreux financiers et politiciens de réputation internationale. Un jour, l'impresario Bill Devaney lui propose un contrat avantageux pour assurer la protection de sa cliente Rachel, comédienne et chanteuse en pleine ascension, menacée par un fan inconnu. TELERAMA ma gauche, le garde du corps, Kevin Costner, à ma droite, le « corps » au demeurant bien joli , Whitney Houston. Ils forment un très beau couple. Elle est chanteuse et reçoit des lettres de menaces. Du coup, une scène de sa vie quotidienne, où ses fans agglutinés tentent de lui manifester leur amour, devient un véritable cauchemar. À part ce moment formidable, Bodyguard est filmé avec efficacité mais sans surprise. Écrit il y a vingt ans pour Steve McQueen par Lawrence Kasdan (scénariste de L'Empire contre- attaque, Les Aventuriers de l'arche perdue et Le Retour du Jedi et réalisateur des Copains d'abord et de Grand Canyon), c'est une gentille bluette au goût suranné. Frank Farmer, ancien agent des services secrets, est un garde du corps émérite qui a mis ses talents à la disposition de deux présidents et de nombreux ... |
BOOMERANG, Francois Favrat, Melanie Laurent, Laurent Lafitte, Audrey Dana (dramme)@@Presque 30 ans se sont écoulés depuis le décès de sa mère par noyade. C'est seulement à la suite de sa séparation qu'Antoine constate à quel point, malgré les années, cette perte l'a affligé. TELERAMA Morne adaptation d'un roman de Tatiana de Rosnay, où un quadra enquête sur la noyade de sa mère, trente ans auparavant. Ce portrait de famille en forme de polar enchaîne les flash-back faciles et les répétitions — le héros dit qu'on lui cache quelque chose, on lui répond qu'il est parano. Plus grave, la sous-utilisation de la topographie de Noirmoutier, île reliée à la terre par un passage submersible pourtant très métaphorique. — N.Di. Presque 30 ans se sont écoulés depuis le décès de sa mère par noyade. C'est seulement à la suite de sa séparation qu'Antoine consta ... |
CLAIR DE FEMME, Costa Gavras 1979, Yves Montand, Romy Schneider (drame sentimental)@@Michel, traumatisé par la mort imminente de son épouse, ne parvient pas à prendre l'avion qui doit l'emmener à Caracas. En descendant d'un taxi, il bouscule une jeune femme, Lydia, dont il fait tomber le sac. Il s'attache alors à cette inconnue, sans s'apercevoir qu'elle souffre tout autant que lui. Lydia rejoint Michel dans un cabaret où se produit le señor Galba, un dresseur de chiens. Les deux malheureux, éperdus de chagrin, se rendent alors dans le luxueux appartement de la belle-mère de Lydia. L'enfant de cette dernière semble y sombrer dans une folie définitive, par la faute de son père dont on fête pour l'heure l'anniversaire... TELERAMA Spécialiste des pamphlets politiques, Costa-Gavras tente ici un détour du côté du drame sentimental. Habitué aux démonstrations coups de poing, il est visiblement mal à l’aise dans ce conte d’amour et de deuil. L’univers insolite de Romain Gary, pétri de dérision romantique, y perd de sa densité. Pourtant, malgré la maladresse des dialogues et de certaines scènes, trop lourdement paroxystiques, on s’attache à la dérive de ces deux naufragés accrochés l’un à l’autre et cernés par la mort. Fragile, lumineuse, visiblement plus à l’aise que son partenaire Yves Montand, Romy Schneider crée le miracle : suscitant, dans la même minute, l’angoisse et l’espoir, elle bouleverse. Michel, traumatisé par la mort imminente de son épouse, ne parvient pas à prendre l'avion qui doit l'emmener à Caracas. En descendant d'un taxi, il bous ... |
DANCER IN THE DARK, Lars Von Trier 2000, Bjork, Catherine DeneuveDans les années 1960, Selma Jezkova, immigrée tchécoslovaque, s'est installée dans une petite ville des États-Unis avec son fils Gene, âgé de 12 ans. Elle travaille dur et sans relâche pour tenter de réunir l'argent qui doit lui permettre de payer à son fils une opération des yeux avant son treizième anniversaire. Gene, en effet, souffre d'une maladie héréditaire qui le prédestine comme sa mère à la cécité. Pour y parvenir, Selma travaille comme emboutisseuse dans une usine métallurgique, au-delà de ses capacités et au mépris des règles de sécurité. Elle ne s'offre comme distraction que la participation à une comédie musicale montée par la chorale amateur de son quartier. Un jour, Selma et Bill, son voisin, échangent leur secrets : elle devient aveugle et il cache à sa femme Linda qu'il est ruiné. Bill vole finalement à Selma les économies qui devaient servir à sauver son fils ; une série d'événements désastreux s'ensuit alors. TELERAMA: Le magnétisme brutal de l’héroïne tient avant tout à son interprète, Björk, qui s’est immolée pour le rôle. Avec elle, le moindre mouvement devient chorégraphie, le moindre bruit, musique. Même le silence peut casser les oreilles, comme dans cette ahurissante séquence où Selma vient de commettre un meurtre malgré elle. Et pourtant, ce sublime ballet mutique assourdit autant qu’une fanfare cacophonique… Dans les années 1960, Selma Jezkova, immigrée tchécoslovaque, s'est installée dans une petite ville des États-Unis avec son fils Gene, âg&e ... |
ENTRE AMIS, Olivier Baroux 2015, Daniel Auteuil, Gérard Jugnot, Mélanie Doutey, François Berléand, Zabou Breitman (drame sentimental)@Richard, Gilles et Philippe sont amis depuis près de 50 ans. Le temps d'un été, ils embarquent avec leurs compagnes sur un magnifique voilier pour une croisière vers la Corse. Pourtant la cohabitation à bord d'un bateau n'est pas toujours facile. D'autant que chaque couple a ses problèmes, et que la météo leur réserve de grosses surprises. Entre rires et confessions, griefs et jalousies vont remonter à la surface. Chacun va devoir faire le point sur sa vie et sur ses relations aux autres. TELERAMA Des acteurs en roue libre, de l'humour ultra-lourd... On se surprend à espérer que le bateau coule rapidement. Mais non, même pas ! Richard, Gilles et Philippe sont amis depuis près de 50 ans. Le temps d'un été, ils embarquent avec leurs compagnes sur un magnifique voilier pour une croisi&e ... |
EVEREST, Baltasar Kormakur 2015 (drame sport)@Inspiré d'une désastreuse tentative d'ascension de la plus haute montagne du monde, le film suit deux expéditions distinctes confrontées aux plus violentes tempêtes de neige que l'homme ait connues. TELERAMA Un film d’aventures qui n’évite pas le pathos vers la fin, mais qui allie plutôt bien réalisme de l’effort physique et suspense dramatique, en s’inspirant fidèlement d’une tragédie survenue en 1996. Amis du piolet, friands de danger, voici un cadeau pour vous. Une aventure extrême entre pics et gouffres, inspirée de faits tragiques survenus en 1996, moment où commençaient à fleurir les agences organisant des expéditions vers le « toit du monde ». On suit l’une d’entre elles, pas à pas, ce qui garantit une galerie de portraits et une distribution copieuse. Il y a le chef (Jason Clarke), consciencieux et un brin paternaliste, qui s’allie à un autre guide, plus franc-tireur (Jake Gyllenhaal, parfait en tête brûlée cool). Parmi les « clients » : un facteur gentil mais fragile, une (fausse ?) caricature de Texan (Josh Brolin), un journaliste, une Japonaise… Chacun avec ses raisons d’aller tout là-haut, et sa déraison. Sur les aspects lucratifs — la concurrence entre agences de voyages — et les effets pervers — embouteillages périlleux sur les sentiers — de cet alpinisme de plus en plus prisé, c’est parfois confus ou trop superficiel. Ce film de survie, réalisé en altitude par un cinéaste islandais plutôt doué (Jar City), décrit surtout comment l’expédition dégénère au retour de l’ascension, dans une météo soudain monstrueuse. L’éclatement du groupe, le manque progressif d’oxygène, le froid qui attaque, la lente avancée, où le moindre mètre demande un effort surhumain, tout cela est mis en scène de manière très physique, efficace, spectaculaire. Une alliance de réalisme et de suspense dont on sort plutôt conquis. Inspiré d'une désastreuse tentative d'ascension de la plus haute montagne du monde, le film suit deux expéditions distinctes confrontées aux plus violen ... |
EVERYBODY KNOWS Asghar Farhadi 2018, Penélope Cruz, Javier BardemÀ l'occasion du mariage de sa soeur, Laura revient avec ses enfants dans son village natal au coeur d'un vignoble espagnol. Alors que la fête se prépare dans une atmosphère des plus sereine, des évènements inattendus viennent bouleverser le séjour de Laura et font ressurgir un passé depuis trop longtemps enfoui. TELERAMA S’il tournait ici pour la deuxième fois hors d’Iran (cinq ans après Le Passé, en France), Farhadi est resté fidèle à son univers. Comme dans ses autres contes moraux, il montre comment un événement imprévu peut révéler à chacun ses failles intimes. Comment les non-dits, les secrets trop longtemps cachés précipitent la crise au sein de couples déjà désunis. Il confirme par ailleurs qu’il est aussi un formidable directeur d’acteurs, malgré la barrière de la langue. Le casting réunit le gratin du cinéma espagnol, jusque dans les seconds rôles. Javier Bardem, en particulier, est impeccable dans son interprétation tout en nuances de Paco. Ce viticulteur au bon sens paysan se retrouve pris au piège d’une situation qu’il pensait, comme toujours, pouvoir contrôler : l’acteur semble alors porter tous les malheurs du monde sur ses larges épaules soudain bien fragiles… Les personnages si humains d’Asghar Farhadi ne sont jamais d’un bloc. À l'occasion du mariage de sa soeur, Laura revient avec ses enfants dans son village natal au coeur d'un vignoble espagnol. Alors que la fête se prépare dans un ... |
FLORENCE FOSTER JENKINS, Stephen Frears 2016, Meryl Streep, Hugn Grant(drame)New York, 1944. Florence Foster Jenkins, riche héritière new-yorkaise et célèbre mondaine, est convaincue, à tort, d'avoir une très belle voix. Son mari et imprésario, St Clair Bayfield, comédien anglais aristocrate, tient coûte que coûte à ce que sa Florence bien-aimée n'apprenne pas la vérité. Cependant, lorsque Florence décide de se produire en public au Carnegie Hall, St Clair comprend qu'ils s'apprêtent à relever le plus grand défi de leur vie. TELERAMA Le personnage de la millionnaire américaine qui se rêvait cantatrice malgré une voix de crécelle avait inspiré Catherine Frot dans “Marguerite”. Meryl Streep l’incarne avec force cabotinage dans cette comédie trop sage. Mais Hugh Grant y est génial. Depuis que Florence Foster Jenkins a inspiré le personnage de Catherine Frot dans Marguerite, la millionnaire new-yorkaise qui se rêvait cantatrice malgré sa voix de crécelle n'est plus une inconnue en France. Le biopic que Stephen Frears lui consacre a un gros handicap : il est sorti après le film de Xavier Giannoli, perdant l'attrait de la nouveauté et s'exposant à une comparaison risquée. Meryl Streep l’incarne avec force cabotinage dans cette comédie trop sage. Mais Hugh Grant y est génial. Car le plus original des deux, c'est le français. Frears s'intéresse à la soprano de pacotille au soir de sa vie, en 1944, quand elle se pique de donner un récital au Carnegie Hall. Il ne manque pas un bibelot précieux à cette reconstitution du décor kitsch dans lequel la « diva » américaine recevait sa cour. La description de cet univers snob ne manque pas d'humour, et le fameux concert atteint une vraie intensité dramatique. Mais domine l'impression de feuilleter un beau livre d'images superficiel. Le réalisateur de The Queen, mordant d'habitude, adoucit ses coups, comme pour privilégier l'émotion à la satire. Une retenue que l'on aurait préféré voir dans le jeu de Meryl Streep... Dommage, car le scénario développe un joli paradoxe : cette amoureuse de la musique qui chantait si faux a rendu ses proches plus sincères en donnant un sens à leur vie. A commencer par son mari, qui profite de l'argent de l'héritière pour se révéler le plus tendre des hommes. Hugh Grant, jamais vu aussi bon, apporte son irrésistible don comique, puis une émotion bouleversante à cet être médiocre, soudain admirable. New York, 1944. Florence Foster Jenkins, riche héritière new-yorkaise et célèbre mondaine, est convaincue, à tort, d'avoir une très belle ... |
INFIDELE, Adrian Lyne 2002, Diane Lane, Richard Gere)(drame erotique)(vo)@Edward et Constance Sumner habitent dans la périphérie de New York une vaste demeure qui sent bon l'ordre et la sérénité. Ce lieu est à l'image de leur couple, si harmonieux qu'on pourrait le croire à l'abri de toute surprise. Un jour, à New York, un vent violent pousse littéralement Connie dans les bras d'un jeune étranger, Paul Martel, négociant en livres rares. Un appel téléphonique de celui-ci, un rendez-vous obtenu à l'arraché sèment en elle la confusion. TELERAMA Connie Sumner mène une vie assez rangée à New York, aux côtés de son mari, Edward, et de son petit garçon, Charlie. Un jour, elle fait la connaissance de Paul Martel, un jeune et séduisant Français qui achète et revend des livres anciens. Il la séduit immédiatement et, lorsqu'il la rappelle pour lui proposer un rendez-vous, elle cède. Ils deviennent très vite amants. Cette liaison torride transforme complètement Connie, et ses amies préviennent bientôt Edward de leurs soupçons sur la fidélité de sa femme. Ces craintes sont rapidement confirmées par le collègue d'Edward, qui lui avoue avoir surpris les amants. Edward se rend alors chez Paul et, au cours d'une violente altercation, le tue... Edward et Constance Sumner habitent dans la périphérie de New York une vaste demeure qui sent bon l'ordre et la sérénité. Ce lieu est à l' ... |
JEUX INTERDITS René Clément 1952, Brigitte Fossey (middle)Au cours de l'Exode de 1940 en France, Paulette, cinq ans, perd ses parents. À l'abandon, elle erre sans savoir où elle va jusqu'au jour où elle rencontre Michel, un petit garçon de dix ans qui la conduit chez lui. D'abord réticent, le père de Michel accueille la petite, notamment pour ne pas que leurs voisins en tire profit. Puis les deux enfants commencent à créer des sépultures pour divers animaux morts et Michel vole des croix pour les tombes, créant des ennuis. Au cours de l'Exode de 1940 en France, Paulette, cinq ans, perd ses parents. À l'abandon, elle erre sans savoir où elle va jusqu'au jour où elle rencontre Mich ... |
L ACCIDENT (Das Bleibt unter uns), Verena S. Freytag 2022, Hanno Koffler, Anna UnterbergerEn Allemagne, une femme de ménage moldave tombe dans le coma après un accident survenu durant ses heures de travail. Son employeuse décide alors de s’occuper de sa fillette sans en référer aux autorités. Un drame poignant qui met en lumière la précarité des travailleurs immigrés. En Allemagne, une femme de ménage moldave tombe dans le coma après un accident survenu durant ses heures de travail. Son employeuse décide alors de s’occ ... |
L AMANT DOUBLE, Francois Ozon 2017, Marine Vacth, Jérémie Renier (drame sentimental)@Chloé, une jeune femme fragile, en proie à la dépression, suit une psychothérapie auprès de Paul, dont elle ne tarde pas à tomber amoureuse. Les mois passent et les jeunes gens s'installent ensemble. Chloé découvre cependant que son compagnon a totalement occulté une partie de son existence. TELERAMA François Ozon est l’un des rares cinéastes actuels à distiller, de film en film, l’idée déconcertante que ses images mentent. Qu’elles peuvent tromper. Avec lui, on a toujours deux films pour le prix d’un : celui qu’il exhibe, avec des tours de passe-passe visibles, tel un styliste surdoué. Et celui qu’il dissimule et réserve aux plus exigeants… Côté spectacle, François Ozon multiplie les références (Brian De Palma, Alfred Hitchcock), qu’il assume et magnifie grâce à une mise en scène qui ne cesse d’insuffler une douce et suffocante sensation de malaise. Ce formalisme n’est qu’un trompe-l’œil : il lui permet de s’infiltrer, comme un voleur, dans l’inconscient de personnages imprévisibles et ambigus — on songe au moment, presque drôle, où Chloé s’aperçoit que les deux frères psy se désirent bien plus qu’ils ne la désirent, elle… Dans ce périple cru, cruel, brutal, le cinéaste cerne ses héros avec une précision de clinicien. Conforme, sans doute, à l’idée qu’il se fait de l’humanité : un monde de névrosés, cabossés et fragiles, séduisants et séducteurs, à jamais inguérissables. Chloé, une jeune femme fragile, en proie à la dépression, suit une psychothérapie auprès de Paul, dont elle ne tarde pas à tomber amoureus ... |
L OUBLI DES ECUREUILS, Marc Dietschreit, Nadine Heinze, Emilia Schüle, Günther Maria Halmer, Fabian Hinrichs, Anna StieblichL'Ukrainienne Marija travaille en Allemagne comme aide-soignante 24 heures sur 24 pour soutenir sa famille restée au pays. Ici, elle s'occupe 24 heures sur 24 de Curt, atteint de démence. Lorsque la fille contrôlante de Curt s'absente en raison d'un accident, Curt commence à penser que Marija est sa défunte épouse. Pour avoir la paix, Marija joue le jeu et elle se rend compte que Curt se sent mieux grâce à cela. Mais il y a aussi le fils de Curt, qui s'intéresse plus à Marija qu'à Curt. Ecrit et réalisé par Marc Dietschreit et Nadine Heinze, « L’oubli des écureuils » suit le voyage en enfer de la jeune Marija, venue s’occuper d’un vieil homme sénile en Allemagne. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Les règles strictes imposées par la fille de Curt donnent le ton dès le début : blouse obligatoire, pas de maquillage ni de bijoux, visites interdites, strict respect des horaires de repas, et vérification des selles du viel homme ! Celui-ci est grincheux, et disons-le clairement, pas vraiment sympathique. Mais la jeune femme s’accroche à la tâche, et se prend d’affection pour Curt. Surgit alors Philipp, le fils de la famille, qui va tomber sous le charme de Marija. Après visionnage, difficile de trancher entre » comédie humaine » et « voyage en enfer chez les bourgeois allemands ». Le film nous offre quelques scènes intenses et déchirantes, mais frôle également parfois le grotesque. C’est notamment le cas avec le personnage de Philipp, qui a défaut de vouloir/pouvoir épouser Marija, lui propose ni plus ni moins de lui servir d’escorte de luxe. Une chose est en revanche certaine : l’excellente prestation (comme toujours !) d’Emilia Schüle. L’actrice de la série « Ku’damm 56/59/63« , « Traumfabrik » ou encore « High Society » se fond avec aisance dans son personnage tout en nuances. Elle reste assurément l’atout numéro 1 du film. Sorti en pleine pandémie l’année dernière en Allemagne, « L’oubli des écureuils » est probablement passé à côté de son public. Malgré ses quelques points faibles, le film parvient à maintenir l’intérêt du spectateur sans aucun problème. Et pour ceux qui se poseraient la question du titre, celui-ci fait référence à ces charmantes petites bêtes qui avant l’hiver font des provisions de noix, avant d’oublier où elles se trouvent, et de mourir de faim… L'Ukrainienne Marija travaille en Allemagne comme aide-soignante 24 heures sur 24 pour soutenir sa famille restée au pays. Ici, elle s'occupe 24 heures sur 24 de Curt, attei ... |
LA LISTE DE SCHINDLER Steven Spielberg 1993, Liam Neeson, Ben Kingsley, Ralph FiennesL'homme d'affaires Oskar Schindler arrive à Cracovie en 1939, prêt à profiter de la Seconde Guerre mondiale, qui vient de commencer. Après avoir rejoint le parti nazi pour des raisons politiques, il emploie des ouvriers juifs dans son usine. L'homme d'affaires Oskar Schindler arrive à Cracovie en 1939, prêt à profiter de la Seconde Guerre mondiale, qui vient de commencer. Après avoir rejoint ... |
LA STRADA Federico Fellini 1954, Giulietta Masina, Anthony Quinn@@Gelsomina, femme enfantine naïve, a été cédée par sa mère à Zampano, un hercule de foire qui vit de ses piètres numéros. La frêle jeune fille va peu à peu se mettre à aimer le colosse malgré sa brutalité. Zampano se découvre une sorte de rival en la personne d'un funambule lunaire, baptisé il Matto, le fou. Gelsomina, femme enfantine naïve, a été cédée par sa mère à Zampano, un hercule de foire qui vit de ses piètres numéros ... |
LA VIE REVEE DES AUTRES, Didier Le Pêcheur et Jérôme Cornuau 2024, Arthur Dupont, Charlie Bruneau (drame)@Franck et Karine Petit décident de tout quitter pour réaliser leur rêve : vivre dans un chalet à la montagne. Sauf que, à leur arrivée, ils apprennent que la construction de leur chalet n'est pas terminée. Estelle et Patrick Fleutiot, le couple de promoteurs qui leur loue ce chalet, leur proposent une alternative. TELERAMA Librement inspiré de l’affaire Flactif, qui avait défrayé la chronique en 2003, ce téléfilm entend montrer les mécanismes de l’envie et de la jalousie qui furent à l’œuvre dans ce fait divers à l’issue sinistre. Il y avait matière à une réflexion subtile sur le pouvoir de l’argent, le ressentiment de classe, le poids des différences sociales... Hélas, le film, dépourvu d’ambiguïté, prend le spectateur par la main à chaque scène, rendant l’ensemble monocorde et prévisible : on a compris au bout de cinq minutes ce qui allait se passer. Plus irritant que captivant, même si la fin, sobre et glaciale, s’avère assez réussie. Franck et Karine Petit décident de tout quitter pour réaliser leur rêve : vivre dans un chalet à la montagne. Sauf que, à leur arrivée, ils ... |
LE DIABLE N EXISTE PAS, Mohammad Rasoulof (drame)@@Iran, de nos jours. Heshmat est un mari et un père exemplaire mais nul ne sait où il va tous les matins. Pouya, jeune conscrit, ne peut se résoudre à tuer un homme comme on lui ordonne de le faire. Javad, venu demander sa bien-aimée en mariage, est soudain prisonnier d'un dilemme cornélien. Bharam, médecin interdit d'exercer, a enfin décidé de révéler à sa nièce le secret de toute une vie. Ces quatre récits sont inexorablement liés. Iran, de nos jours. Heshmat est un mari et un père exemplaire mais nul ne sait où il va tous les matins. Pouya, jeune conscrit, ne peut se résoudre à tu ... |
LE REVENANT, Alejandro Gonzalez inarriitu 2015, Leonardo di Caprio, Tom Hardy (drame)@@Durant une expédition dans une Amérique profondément sauvage, le légendaire trappeur Hugh Glass est brutalement attaqué par un ours et laissé pour mort par les membres de sa propre équipe. Dans sa quête de survie, Glass endure une souffrance inimaginable ainsi que la trahison de son homme de confiance, John Fitzgerald. Guidé par la volonté et l'amour de sa famille, Glass doit affronter un hiver brutal dans une inexorable lutte pour survivre et trouver la rédemption. Durant une expédition dans une Amérique profondément sauvage, le légendaire trappeur Hugh Glass est brutalement attaqué par un ours et laiss&eacu ... |
LE SALAIRE DE LA PEUR, Henri-Georges Clouzot, Yves Montand, Charles Vanel (drame)@@À Las Piedras, sorte de ville frontière à la population hybride, le travail manque. Chacun noie, sous le soleil, son ennui dans l'alcool. Non loin de la ville, la SOC, une compagnie pétrolière américaine, fait la pluie et le beau temps des embauches. À Las Piedras, sorte de ville frontière à la population hybride, le travail manque. Chacun noie, sous le soleil, son ennui dans l'alcool. Non loin de la ville, ... |
LES CERF VOLANTS DE KABOUL Marc Forster 2007, Khalid Abdalla, Atossa Leoni (mini)@@@Hassan, le fils des domestiques, protège Amir, peureux fils d'un commerçant de Kaboul. Les deux garçons sont comme des frères. Mais un jour, au lieu de secourir son ami agressé, Amir prend la fuite. Cette trahison résonne avec l'histoire qui se joue au même moment en Afghanistan : les Soviétiques envahissent le pays, tandis qu'Amir et son père le quittent. Vingt ans après, Amir l'exilé reçoit un appel de son ami Rahim Khan, lui disant qu'il peut encore réparer ses fautes. Hassan, le fils des domestiques, protège Amir, peureux fils d'un commerçant de Kaboul. Les deux garçons sont comme des frères. Mais un jour, au lieu de ... |
LES CHOSES HUMAINES, Yvon Attal 2023, Alex.Attal, Charlotte Gainsbourg, Pierre Arditi, Mathieu Kassovitz (drame societe)@@@Un jeune homme est accusé d'avoir violé une jeune femme. Qui est ce jeune homme et qui est cette jeune femme ? Est-il coupable ou est-il innocent ? Est-elle victime ou uniquement dans un désir de vengeance, comme l'affirme l'accusé ? TÉLÉRAMA Chez Yvan Attal, les adaptations se suivent et ne se ressemblent pas. Deux ans après Mon chien stupide, qui scrutait la crise existentielle d’un quinquagénaire né sous la plume de John Fante, l’acteur-réalisateur puise chez la romancière Karine Tuil la matière noire d’un drame sur la zone grise, au cœur des débats sur le consentement. Alexandre (Ben Attal, qui a parfois, c’est troublant, la même voix que son père) a-t-il violé Mila (Suzanne Jouannet), la fille du nouveau compagnon de sa mère, durant une soirée floutée par l’alcool et la fumette ? Elle l’accuse, il nie, c’est parole contre parole. Un jeune homme est accusé d'avoir violé une jeune femme. Qui est ce jeune homme et qui est cette jeune femme ? Est-il coupable ou est-il innocent ? Est-e ... |
LES INTRANQUILLES, Joachim Lafosse 2021, Leïla Bekhti, Damien Bonnard (drame societe)@@@Leïla, mère de famille, se bat au quotidien pour tenter de sauver le couple qu'elle forme avec Damien, un mari bipolaire. Ils s'aiment profondément, mais les effets de la maladie se ressentent durement dans leur quotidien. Il tente de poursuivre sa vie avec elle sachant qu'il ne pourra peut-être jamais lui offrir ce qu'elle désire. TELERAMA Le bonheur d’une famille se délite sous l’effet de la bipolarité du père. Un film intense, inspiré par les souvenirs d’enfance du cinéaste. Que peut l’amour contre plus fort que lui ? C’est, davantage que la maladie mentale en elle-même, la question centrale du long métrage présenté en compétition à Cannes, possiblement le meilleur de Joachim Lafosse à ce jour. Le réalisateur belge s’intéresse depuis ses débuts à l’éclatement de la famille ( Nue propriété en 2006, L’Économie du couple en 2016) mais aussi à la manipulation et à la toxicité ( Élève libre en 2008, À perdre la raison en 2012). Peut-être parce qu’il s’inspire ici de ses souvenirs d’enfance (son père est bipolaire) sans les tenir trop à distance, il signe avec Les Intranquilles un film moins clinique, moins froidement acéré qu’à l’accoutumée. Sa mise en scène, pourtant, reste impitoyable dans l’art de dépeindre le délitement du clan et l’usure des sentiments. Sous des cieux apparemment radieux, les joies les plus simples se colorent ainsi de malaise, de danger, voire de honte pour Amine (formidable Gabriel Merz Chammah, petit-fils d’une certaine Isabelle Huppert). Les hauts et les bas de Damien transforment le quotidien en grand huit infernal et Leïla, en infirmière malgré elle. L’amoureuse sensuelle vire vigie et virago, répétant à son fils « Ne t’inquiète pas, ça va aller » comme un mantra auquel personne ne croit. Quand Damien exulte, elle se rembrunit, et vice versa. Imprévisible, fiévreux ou abattu, Damien Bonnard excelle en homme luttant pour ne pas se dissoudre dans le lithium, et Leïla Bekhti, constamment sur le qui-vive, bouleverse en victime collatérale. Que peut l’amour ? Tout, rien, pas assez. Leïla, mère de famille, se bat au quotidien pour tenter de sauver le couple qu'elle forme avec Damien, un mari bipolaire. Ils s'aiment profondément, mais les eff ... |
LES PETITS MOUCHOIRS, Guillaume Canet 2010, Marion Cotillard, François Cluzet, Benoit Magimel, Valérie Bonneton, Gilles Lellouche et Laurent Lafitte (drame)@@A la suite d'un événement bouleversant, une bande de copains décide, malgré tout, de partir en vacances au bord de la mer comme chaque année. Leur amitié, leurs certitudes, leur culpabilité, leurs amours en seront ébranlées. Ils vont enfin devoir lever les petits mouchoirs qu'ils ont posés sur leurs secrets et leurs mensonges. TELERAMA Leur copain est mourant, eux partent en vacances. Guillaume Canet s’offre un casting de luxe mais n’a rien à dire. Prétentieux et vain. Après Mon idole et Ne le dis à personne - dont le succès a masqué les défauts -, c'est de régression qu'il faut parler avec Les Petits Mouchoirs, troisième film de Guillaume Canet, aussi vide qu'est apparemment grande sa prétention à faire date : durée hors normes, casting all stars (Cluzet, Cotillard, Magimel en tête), bande-son soul dont le coût seul doit excéder le budget d'un premier film d'auteur. Un groupe de potes, vieux trentenaires, jeunes quadras, part en vacances au Cap-Ferret tandis que l'un des leurs gît sur un lit d'hôpital (et de douleur). Ont-ils le droit de s'amuser ou, plutôt, de se pourrir la vie à coups de petites névroses quand l'autre est entre la vie et la mort ? On ne sait pas. Guillaume Canet si, qui donne la réponse via un improbable personnage d'ostréiculteur philosophe. Ont-ils le droit d'être aussi antipathiques, lourdement caricaturés et désespérément incultes ? On sait que non. Canet s'est-il rendu compte que tous les mecs de son film sont lourdauds, décérébrés, le regard scotché à leur nombril (ou plus bas) ? Et toutes les filles effacées ou hystériques ? Sauf Marion Cotillard, sans doute sauvée à ses yeux parce que son comportement amoureux est celui d'un mec... L'étanchéité du groupe au monde réel est symbolisée par une image fugitive, et ici incongrue : Marion Cotillard dépliant maladroitement Le Monde. Pourquoi un journal, pourquoi un livre, pourquoi une conversation intéressante en vacances, alors qu'il y a la bouffe et le ski nautique ? Si Les Petits Mouchoirs est un film générationnel, alors, pour une fois, on est heureux de ne plus faire partie de cette génération-là... A la suite d'un événement bouleversant, une bande de copains décide, malgré tout, de partir en vacances au bord de la mer comme chaque année. Leu ... |
LUKE LA MAIN FROIDE, Stuart Rosenberg 1967 Paul Newman, George Kennedy (drame)@@Pour s'être livré à des actes de vandalisme, Luke Jackson purge une peine de deux ans de prison dans un camp de travail. Il s'y lie d'amitié avec un autre détenu, Dragline, et devient bientôt le prisonnier le plus populaire grâce à son flegme et sa joie de vivre communicative. TELERAMA Luke est condamné au bagne. Charge contre les conditions pénitentiaires et prestation extraordinaire de Newman. Un rôle culte. Il a le cool, Newman ! Et avec le rôle de Luke la main froide, il est passé maître en la matière. En un regard face caméra souligné d’un sourire narquois, l’acteur fait de ce personnage nihiliste (il décapite des parcmètres sans même chercher à récupérer l’argent), individualiste et asocial, un héros romantique sur lequel tout le monde projette ses propres fantasmes. Luke est condamné pour vandalisme et écope de deux ans de travaux forcés au sein d’un pénitencier du sud des États-Unis. Confronté à la bêtise et à la violence du système carcéral, Luke se bat avec ses armes dérisoires, l’ironie et le je-m’en-foutisme. Deux scènes magistrales posent le personnage : celle de la bagarre avec le caïd du camp, trop fort pour Luke mais face à qui il ne cédera pas, jusqu’à ramper dans la poussière mais décidé à se relever coûte que coûte. Autre scène d’anthologie, celle où il gobe cinquante œufs durs en une heure. Comble du pari inutile ! À la fin, étendu sur une table autour des coquilles vides, Luke sourit encore une fois face à l’inanité de son geste. Dans les deux scènes, Luke a tenu. Pourquoi ? Parce que sinon rien n’a d’importance, autant abandonner tout de suite… Tourné à la fin des années 1960, alors que la révolution du Nouvel Hollywood frémit, le film est parfois un peu insistant avec ses zooms avant tonitruants, son personnage de maton inflexible aux lunettes miroir qui cachent son regard (la loi est aveugle…) et l’apparition de la mère de Luke trop chargée en pathos. Mais Paul Newman incarne avec une telle puissance l’absurdité de la condition humaine qu’on lui pardonnera beaucoup. Mister Cool gagne toujours à la fin. Pour s'être livré à des actes de vandalisme, Luke Jackson purge une peine de deux ans de prison dans un camp de travail. Il s'y lie d'amitié avec un autr ... |
MAL DE PIERRES, Nicole Garcia 2016, Marion Cotillard, Louis Rarrel (drame sentimental)@@@Gabrielle a grandi dans la petite bourgeoisie agricole où son rêve d'une passion absolue fait scandale. À une époque où l'on destine d'abord les femmes au mariage, elle dérange, et on la croit folle. Ses parents la donnent à José, un ouvrier saisonnier, chargé de faire d'elle une femme respectable. TELERAMA Années 1950. Une jeune femme mal mariée découvre la passion… Nicole Garcia réussit son meilleur film. Marion Cotillard est superbe, entre intensité et retenue… Dans la Provence des années 1950, où sa mère dirige une exploitation agricole, Gabrielle bout de frustration et de rage. Elle épouse un homme qu’elle n’aime pas et, dans un sanatorium, s’éprend d’un militaire, blessé en Indochine… Toute la première partie, librement inspirée du roman de Milena Agus, est âpre, intranquille : sûrement ce que Nicole Garcia a réussi de mieux. La sensualité accable tant elle écrase. L’amour sans espoir du mari aussi… Ensuite, la folie amoureuse qui s’empare de Gabrielle, son étonnement, une fois enceinte, de ne jamais recevoir de réponse de son amant à ses lettres reposent sur l’osmose visible de la réalisatrice avec la comédienne Marion Cotillard. Chez Nicole Garcia, les hommes sont beaux, virils et rassurants, en dépit de leurs failles secrètes. Alors que les femmes, sous un regard empreint de tendresse, n’en finissent pas de tomber. On sait l’étonnante expressivité du visage de Marion Cotillard, dont elle se sert non pour exhiber les sentiments, mais pour les réfréner au maximum. L’émotion qu’elle dégage est toujours nette, précise, affinée. C’est ce cache-cache constant entre épure et intensité qui rend le film troublant. Gabrielle a grandi dans la petite bourgeoisie agricole où son rêve d'une passion absolue fait scandale. À une époque où l'on destine d'abord les f ... |
MON ROI, Maïwenn 2015, Vincent Cassel, Emmanuelle Bercot (drame sentimental)@@Tony est admise dans un centre de rééducation après une grave chute de ski. Dépendante du personnel médical et des antidouleurs, elle prend le temps de se remémorer l'histoire tumultueuse qu'elle a vécue avec Georgio. Pourquoi se sont-ils aimés ? Qui est réellement l'homme qu'elle a adoré? Pour Tony c'est une difficile reconstruction qui commence désormais, un travail corporel qui lui permettra peut-être de définitivement se libérer. TELERAMA La passion destructrice d’une femme pour un bad boy sexy. Maïwenn a toujours autant de talent pour diriger ses acteurs. Du cinéma-vérité saisissant. Mon roi n’est pas le portrait à charge d’un pervers narcissique, mais un film sur l’addiction amoureuse et ses mystères. Emmanuelle Bercot, impliquée corps et âme dans les rires, les cris et les larmes, est magnifique. Mais le film repose, surtout, sur le jeu captivant de Vincent Cassel, philtre d’amour et poison ravageur dans la même seconde. Comme l’héroïne, jusqu’à la fin, on ne peut quitter ce roi des yeux. Tony est admise dans un centre de rééducation après une grave chute de ski. Dépendante du personnel médical et des antidouleurs, elle prend le te ... |
ORANGE MECANIQUE, Stanley Kubrick 1971, Malcolm McDowell, Adrienne Corri, Patrick Magee (societe drame)@@Alex et sa bande de délinquants (les Droogs), habit blanc et melon noir, sèment la terreur pour le plaisir dans une Angleterre futuriste. Un soir, ils font irruption chez un écrivain, qu’ils tabassent et dont ils violent et tuent la femme. Lors d’une autre agression, Alex est arrêté. En prison, on le choisit comme cobaye d’une expérience de réhabilitation. TELERAMA La force du film choc de Kubrick vient de sa capacité à placer le spectateur devant ses pulsions taboues, à considérer le cerveau comme un antre de la folie. Orange mécanique se divise en trois parties. La première narre les sinistres exploits des Droogs sur fond de Beethoven passé à la moulinette synthétique de Walter Carlos. C’est la plus datée et la plus riche en tics à recycler, ce dont ne se sont pas privés les groupes de rock anglais. C’est un genre de comédie musicale, où des clowns punk en tenue d’escrime et slip kangourou par-dessus dansent un ballet sadique, entre Beckett et Starmania. La deuxième partie, plus austère, décrit l’échec de toute morale appliquée au cas d’Alex. Impossible à mater selon la « méthode » Ancien Testament, l’ignoble individu se voit proposer un nouveau traitement… Enfin, la troisième partie nous fait entrer de plain-pied dans la folie, cette folie qui berce ou fait exploser les films de Stanley Kubrick. Un engrenage de délires paranoïaques auquel seule peut répondre une autre folie : celle du cinéaste. Et comme Kubrick est maître en la matière, c’est l’intensité de son dernier volet qui fait tenir à ce film baroque le choc du temps qui passe. Alex et sa bande de délinquants (les Droogs), habit blanc et melon noir, sèment la terreur pour le plaisir dans une Angleterre futuriste. Un soir, ils font irruption ... |
OSLO 31 AOUT, Joachim TrierAnders, jeune homme tourmenté, termine une cure de désintoxication (drogue et alcool) à la campagne. Un 31 août, une journée de permission à Oslo lui donne l'occasion de revoir des proches, de rechercher une amoureuse perdue de vue et de flâner dans la ville. Jusqu'aux premières lueurs de l'aube, une traversée du jour et de la nuit partagée entre ardeur de vivre et tentation du suicide. TELERAMA Voilà un film qui, au lieu de nous divertir aimablement comme tant d'autres, semble nous demander pourquoi on vit, nous rappeler pourquoi on meurt. D'une beauté foudroyante, d'une lucidité perçante, Oslo, 31 août est une perle rare. Son héros au bord du vide est du genre inoubliable. L'effet de sidération commence dès le prologue, série de vues de la capitale norvégienne, étrangement déserte, sur fond de voix intérieures et souvenirs de jeunesse : « Les marches interminables vers des fêtes bizarres auxquelles on ne savait jamais si on était vraiment invités ou pas... » Outre la litanie des « Je me souviens » à la Georges Perec, cette Scandinavie-là est tout imprégnée de culture française. Le réalisateur, Joachim Trier, connaît autant Barthes que Bresson, Stendhal que Godard. Son premier film, Nouvelle Donne, évoquait irrésistiblement le Desplechin de Comment je me suis disputé..., avec ses rivalités littéraires et juvéniles, ses ambitions corrigées. Oslo, 31 août est librement adapté du Feu follet de Pierre Drieu la Rochelle, devenu trente ans après sa parution (en 1931), le chef-d'oeuvre de Louis Malle, et celui son acteur, Maurice Ronet. Le personnage de Drieu la Rochelle était un dandy défait, un jet-setteur en bout de course. Son héritier norvégien, prénommé Anders, est plus quotidien : un grand garçon en jean-baskets, au regard intense, au sourire charmant. Mais lui aussi termine une cure de désintoxication - drogue comme dans le roman, plus alcool comme dans le film de Malle. Le 31 août est sa journée de « permission ». De retour en ville, il revoit des proches, tente de retrouver une amoureuse perdue de vue, se glissera dans l'une de ces soirées qui étaient son milieu naturel, quelques années auparavant. La question du suicide hante le film, comme jadis le roman. Prince déchu, dégrisé, Anders, c'est désormais monsieur Tout-le-monde ou presque, à la recherche d'une raison de garder sa place parmi les vivants. La prime jeunesse est finie, les années sauvages sont derrière, il s'agit de faire l'adulte. Encore faut-il en avoir envie. C'est, donc, une journée probatoire : la vie doit faire ses preuves aux yeux du revenant. L'idée de le montrer passant un entretien d'embauche est formidable : Anders est reçu par un possible employeur, mais c'est lui, évidemment, l'examinateur, qui, face à chacun(e), observe, juge et délibère. Nuances de la perception Un suspense poignant s'insinue dans cette douceur de fin d'été. Les déambulations du personnage dans la ville de ses frasques passées rappellent Cléo de 5 à 7, d'Agnès Varda - l'un des films de chevet du réalisateur -, dont l'héroïne parcourait Paris en attente d'un diagnostic médical décisif. Il y a les conversations aux terrasses des cafés, qui parviennent à Anders comme en volutes. Cette futilité, cette naïveté qui semblent tour à tour désirables et dérisoires. Il y a la peau des filles, leurs cheveux, leurs épaules, mais vus désormais comme à travers une vitre. Autant de nuances de la perception miraculeusement restituées : le film balance sans cesse entre la tentation sensuelle et une distance irrévocable aux choses et aux êtres. Moment crucial entre tous, la confrontation avec le meilleur ami. Anders se retrouve face à un père de deux enfants en bas âge. L'ex-compagnon des virées nocturnes se montre à la fois honteux (un peu) et fier (beaucoup) de patauger en chaussettes dans les jouets pour bébé. Face à l'apocalypse intime d'Anders, il avoue toute la routine de son quotidien, replié sur les contraintes familiales et le travail, le jeu vidéo ayant remplacé le sexe dans le couple. Sa satisfaction est palpable, et peut-être on ne sait quel sentiment de revanche, au-delà de l'amitié, de l'inquiétude. La discussion sur le sens de la vie, déchirante et drôle, projette le film à une altitude exceptionnelle, d'autant que les deux acteurs sont époustouflants. Vers la fin du Feu follet selon Louis Malle, la parole prenait le dessus, le mal qui rongeait le héros était explicité, ressassé. Oslo, 31 août, brille, au contraire, par une dernière ligne droite étourdissante, tout en sensations et décibels, piètres remparts contre la solitude. Ce sont l'ivresse nocturne, les débordements dionysiaques, le sel même de la jeunesse du personnage qui sont, cette fois, interrogés, mis à l'épreuve. Le film y gagne l'attrait supplémentaire d'une fête un peu fêlée. De celles qui se terminent à l'aube d'un premier septembre, autour d'une piscine de plein air et de ses hauts plongeoirs. Vertige compris. Anders, jeune homme tourmenté, termine une cure de désintoxication (drogue et alcool) à la campagne. Un 31 août, une journée de permission à ... |
PARTIR, Catherine Corsini 2009, Kristin Scott Thomas, Sergi LopezUne histoire d'amour d'une femme mariée malheureuse avec un ancien détenu a des conséquences dangereuses. TELERAMA Le mari, la femme, l'amant... Et une passion soudaine, irrésistible, bousculant la quiétude ensoleillée de Nîmes. Presque un roman de Françoise Sagan, en théorie. Ou un film de François Truffaut sur l'enfer amoureux. Mais ici, ce n'est pas le sentiment qui domine, si intense soit-il, mais l'argent. Suzanne et Ivan, ce couple improbable (« la bourgeoise et le prolo », ricane le mari), ont beau s'aimer — la réalisatrice filme crûment leurs étreintes —, ils se heurtent moins au qu'en-dira-t-on qu'au fric tout-puissant. C'est si facile, quand on est un notable respecté, de passer quelques coups de fil pour priver d'argent l'épouse infidèle, et de travail le rival détesté... Catherine Corsini croit au poids des classes sociales sur les êtres. Suzanne mise son avenir, sa vie auprès de cet ouvrier. Et c'est précisément cette « faute » (elle le quitte pour un « inférieur ») que ne peut excuser son mari... Kristin Scott Thomas a toujours eu l'art de suggérer le trouble d'un personnage. Ici, elle change de visage — parfois extrêmement belle, parfois presque moche — en fonction des sentiments qui l'assaillent. Avec elle, pour elle, Catherine Corsini a réussi un film au lyrisme sobre. Une tragédie miniature, construite en courtes scènes, qui, entre deux retours au noir — des entractes —, semblent filer droit vers l'inéluctable. Une histoire d'amour d'une femme mariée malheureuse avec un ancien détenu a des conséquences dangereuses. TELERAMA Le mari, la femme, l'amant... E ... |
PICNIC A HANGING ROCK, Peter Weir 1975, Rachel Roberts, Dominic GuardLe 14 février 1900, jour de la Saint-Valentin, en Australie. L'école de jeunes filles d'Appleyard organise un pique-nique à Hanging Rock, la montagne sacrée des aborigènes. Trois élèves et leur professeure partent explorer les passages étroits et intrigants entre les monolithes. En chemin, elles croisent deux jeunes garçons. Au retour à l'école, les quatre jeunes filles manquent à l'appel. On part à leur recherche et Albert retrouve Irma, vivante mais totalement amnésique. Le 14 février 1900, jour de la Saint-Valentin, en Australie. L'école de jeunes filles d'Appleyard organise un pique-nique à Hanging Rock, la montagne sacr&eacu ... |
POUR UNE FEMME, Diane Kurys 2013, Benoit Magimel, Nicolas Devauchelle, Melanie Thierry (drame sentimental)@Dans les années 1980, au lendemain de la mort de Léna, sa mère, Anne découvre dans une de ses valises une photo qui la bouleverse. Celle-ci révèle l'existence d'un oncle, frère de Michel, son père, dont ce dernier n'a jamais parlé. TELERAMA Elle a puisé dans sa famille la matière de ses réussites : Diabolo menthe (1977) et Coup de foudre (1983). Ici, Diane Kurys déplace son regard : depuis toujours fascinée par sa mère, elle donne ici l'avantage au père. Qui était, lui, tout entier dans la fascination de sa femme ! C'est dire que rien ne change profondément... A travers ce couple né en pleine guerre, la cinéaste décrit l'amour difficile entre ses parents. Tout ce qui touche aux sentiments sonne juste. Dès qu'il reflète le contexte historique, le film devient assez banal. Si un charme persiste, c'est grâce à Mélanie Thierry, dont la présence n'a jamais été si belle, si forte. — Frédéric Strauss Dans les années 1980, au lendemain de la mort de Léna, sa mère, Anne découvre dans une de ses valises une photo qui la bouleverse. Celle-ci rév&e ... |
REBECCA, Alfred Hitchkok 1939, Laurence Olivier, Joan Fontaine@.Tandis que le riche Maxim de Winter pleure sa femme disparue, il rencontre sur la Côte d'Azur une jeune dame de compagnie. Il l'épouse et l'emmène dans sa demeure anglaise de Manderley, que hante le souvenir de la défunte, Rebecca. TELERAMA D’apparence plus classique que les fameux “Psychose” ou “Fenêtre sur cour”, ce séjour chez une châtelaine se révèle pourtant bien troublant… Sous le raffinement aristocratique couve une fièvre des sens haletante. Quand elle épouse Maxim de Winter, aristocrate veuf, la jeune ingénue pense vivre un conte de fées. Mais Manderley, la demeure ancestrale de Max, ne semble tolérer qu’une châtelaine : Rebecca, la précédente épouse de Winter, disparue en mer. Son souvenir hante chaque pièce, jalousement entretenu par la gouvernante… À partir du roman gothique de Daphné Du Maurier, c’est « Alice au pays des cauchemars ». Mi-héroïne de Lewis Carroll, mi-femme de Barbe-Bleue, Joan Fontaine oscille entre innocence et curiosité morbide. Le suspense se construit sur un vide, une absence. Un chien mélancolique, une brosse à cheveux, un rideau gonflé par le vent dessinent en creux l’obsédante présence de la défunte épouse. Comme dans Psychose ou Les Oiseaux, Hitchcock joue avec le fantastique. Cette ambiguïté culmine dans la fixité hantée du regard de la gouvernante. Elle ne tourmente pas la tendre Joan Fontaine par hasard : à travers elle, Hitchcock parle de perversité. Il multiplie les métaphores suggestives. La prude jeune femme traque l’ombre de sa voluptueuse devancière comme on cherche à identifier son propre désir. Un pur chef-d’œuvre. Tandis que le riche Maxim de Winter pleure sa femme disparue, il rencontre sur la Côte d'Azur une jeune dame de compagnie. Il l'épouse et l'emmène dans sa demeu ... |
SANG FROID, Lliam Neeson (drame)@La vie tranquille de Nels Coxman s'effondre lorsque son fils bien-aimé meurt dans des circonstances mystérieuses. Sa recherche de la vérité se transforme rapidement en vengeance contre un baron de la drogue psychotique nommé Viking et ses hommes de main minables. TELERAMA Un conducteur de chasse-neige entasse les cadavres après la mort de son fils, tué par des trafiquants. Qu’est-il arrivé au cinéaste norvégien, auteur de la comédie noire Refroidis (2014) ? Dans cet auto-remake en anglais, l’humour s’est volatilisé. Ne reste qu’un film de vengeance impersonnel. La vie tranquille de Nels Coxman s'effondre lorsque son fils bien-aimé meurt dans des circonstances mystérieuses. Sa recherche de la vérité se transform ... |
SAUVER OU PERIR, Frederic Tellier, Pierre Niney, Anais Demoustier (drame)@@Franck est sapeur-pompier de Paris. Il sauve des gens. Il vit dans la caserne avec sa femme qui accouche de jumelles. Il est heureux. Lors d'une intervention sur un incendie, il se sacrifie pour sauver ses hommes. À son réveil dans un centre de traitement des grands brûlés, il comprend que son visage a fondu dans les flammes. Il va devoir réapprendre à vivre, et accepter d'être sauvé à son tour. Franck est sapeur-pompier de Paris. Il sauve des gens. Il vit dans la caserne avec sa femme qui accouche de jumelles. Il est heureux. Lors d'une intervention sur un incendie, il se ... |
SIBYL, Justine Triet 2019, Virginie Efira, Adèle Exarchopoulos (drame)@@ (film complet)Sibyl est une romancière reconvertie en psychanalyste. Rattrapée par le désir d'écrire, elle décide de quitter la plupart de ses patients. Alors qu'elle cherche l'inspiration, Margot, une jeune actrice en détresse, la supplie de la recevoir. En plein tournage, elle est enceinte de l'acteur principal... qui est en couple avec la réalisatrice du film. TELERAMA Dès la première séquence, il y a du vertige, de la mise en scène. Sibyl (Virginie Efira) déjeune avec son éditeur dans un restaurant japonais où les plats défilent sur un tapis roulant. C’est lui qui parle, s’emballe, à une vitesse ahurissante, lui dressant un tableau foncièrement décourageant de la littérature contemporaine, tout en se réjouissant, bien sûr, qu’elle se remette à écrire. Elle en reste groggy, au tapis, comme les sushis. Ce régal d’humour cinglant fait le lien avec Victoria, le précédent film de Justine Triet, dont on s’éloignera peu à peu. Si Sibyl reprend certains éléments de « dramédie », il surfe moins sur le burlesque, penche davantage du côté de l’introspection et de la gravité. De manière dense et rapide, la réalisatrice a ce talent pour donner d’emblée à son héroïne un vécu, une épaisseur. Sibyl est une psychanalyste au passé tumultueux. Elle a rompu avec sa mère, a connu la passion dévorante avec un homme (Niels Schneider), a sombré un temps dans l’alcool — on la voit assister aux réunions des Alcooliques anonymes. Dorénavant plus posée, à priori, elle décide de suspendre son travail d’analyste pour se lancer dans un nouveau roman, mais elle peine à avancer. Une jeune actrice en détresse (Adèle Exarchopoulos), qui la supplie de la prendre comme patiente, va changer la donne. Margot lui raconte qu’elle est enceinte, qu’elle a une liaison avec un acteur marié (Gaspard Ulliel). Son histoire résonne fortement en Sibyl. Violant toute règle déontologique, elle se met à enregistrer sa patiente, à son insu, pour les besoins de son livre. C’est l’appel de la fiction qui guide alors le film. Tout se met à dérailler, à s’accélérer dans la vie et dans la tête de Sibyl, sous l’emprise de courants contraires. L’ambivalence est reine, jusqu’à ce prénom qui donne le titre, étrange, tout chamboulé, amputé du « e » final et où la place du « i » et du « y » semble inversée. Un prénom qui paraît en cacher un autre, reflet d’une identité double. Cette ambiguïté, on la retrouve chez les autres protagonistes, mais traités sur le mode caustique, comme la sœur par exemple, fausse gentille, vraie perverse (Laure Calamy formidable). Tout le monde a tendance à jouer double jeu dans cet univers de manipulation. Qui peut s’avérer très féroce lorsque Sibyl, décidément sans frein, part à Stromboli rejoindre Margot sur le tournage de son film. La réalisatrice dépeint alors de manière satirique ce qu’est le monde délirant du cinéma, sa fièvre en vase clos, son pouvoir de décupler le fiasco ou le bonheur. Foisonnant, Sibyl embrasse beaucoup de thèmes, brosse bon nombre de personnages, sans se disperser. Le passé et le présent, la réalité et son déni, le travail, la famille, la création, tout est lié, imbriqué, de manière intime. Justine Triet est aidée en cela par Virginie Efira, qui se met à nu, se livre encore plus que dans Victoria. Dans Sibyl, elle ne cesse de passer des épreuves du feu. Qu’elle écoute, dirige, chante, chute, analyse, jouisse ou titube, elle s’affirme toujours avec justesse. Mais c’est sans doute à travers la passion et ses répercussions qu’elle trouble le plus. Et le film avec, dont le motif central palpite de façon masquée, au moins jusqu’à la fin, emplie d’émotion. Sibyl est une romancière reconvertie en psychanalyste. Rattrapée par le désir d'écrire, elle décide de quitter la plupart de ses patients. Alors ... |
TOUT POUR MA FILLE, Hans Steinbichler 2016, Romy Butz, Rosalie ThomassAgricultrice, Hanni Schwaiger vit dans une ferme bavaroise avec son mari Sepp, sa belle-mère et ses trois enfants. La santé de Magdalena, sa fille de neuf ans, l'inquiète, mais la jeune femme consulte en vain une série de médecins, dont aucun ne décèle la moindre pathologie. Se refusant à accepter leurs verdicts rassurants, elle obtient, avec les plus grandes difficultés, que l'enfant subisse des examens approfondis. Agricultrice, Hanni Schwaiger vit dans une ferme bavaroise avec son mari Sepp, sa belle-mère et ses trois enfants. La santé de Magdalena, sa fille de neuf ans, l'inqu ... |
TRE PIANI, Nanni Moretti 2021, Margherita Buy, Riccardo Scamarcio (drame)@@Lucio et Sara, habitent au rez-de-chaussée de l'immeuble. Ils confient souvent leur fille de sept ans, Francesca, à leurs voisins de palier âgés, Giovanna et Renato. Dans l'appartement du dessus, Monica, épouse de Giorgio constamment à l'étranger pour son travail, va devenir mère et lutte contre la solitude. Au dernier étage vivent Dora et Vittorio, tous deux magistrats, et leur fils de vingt ans, Andrea. Ce dernier, qui a renversé une femme, demande l'aide de ses parents. TELERAMA Un accident bouleverse la vie d’un immeuble romain. Avec ce récit en trois époques, Nanni Moretti est plus sombre que jamais, mais toujours émouvant. Même s’il est allé puiser dans la littérature, c’est sans doute à la densité narrative des séries que Nanni Moretti entend se confronter, avec ces intrigues croisées, riches en personnages et en rebondissements. On suit, en trois époques, la vie des habitants d’un bel immeuble de Rome — dans le roman adapté, Trois Étages, de l’Israélien Eshkol Nevo, l’histoire se déroulait à Tel-Aviv. Il y a d’abord le choc et l’effroi d’un accident, une nuit : un adolescent de l’immeuble, ivre au volant, renverse une passante enceinte, défonce un mur de briques de verre du rez-de-chaussée et finit sa course dans un appartement. Les conséquences de ce drame sont multiples : l’affrontement destructeur entre l’adolescent coupable d’homicide involontaire et ses parents, tous deux magistrats ; le soupçon d’agression sexuelle contre une fillette par un voisin de palier retraité à qui elle avait été confiée pendant les événements ; un idylle transgressive entre le père de cette enfant et la petite-fille encore mineure du même retraité… Plus sombre que jamais En dépit de cette profusion inattendue, Tre piani donne souvent l’impression de retrouver un Nanni Moretti familier, celui de La Chambre du fils (2001) plutôt que de Habemus papam (2011). Un Moretti certes plus sombre que jamais, mais émouvant, humaniste, sinon humble. Moins soucieux, cette fois, de briller par des trouvailles de mise en scène que d’accompagner ses personnages éprouvés vers une certaine résilience, ou, du moins, une consolation. Lucio et Sara, habitent au rez-de-chaussée de l'immeuble. Ils confient souvent leur fille de sept ans, Francesca, à leurs voisins de palier âgés, Giovann ... |
TROIS JOURS ET UNE VIE, Nicolas Boukhrief 2018, Sandrine Bonnaire, Charles Berling, Pablo PaulyFin décembre 1999, à Olloy, dans l'Ardenne Belge, un enfant disparaît. Tout le monde dans le village se met alors à suspecter son voisin de la disparition. Ce sera sans compter sur un événement inattendu et dévastateur qui va tout chambouler. TELERAMA ans un village des Ardennes belges, un enfant disparaît… Nicolas Boukhrief adapte un roman de Pierre Lemaitre à la demande de celui-ci, qui a écrit le scénario. Pas de suspense, ni de révélation : d’emblée, on sait que l’enfant a perdu la vie, et on connaît le (tout jeune) responsable de sa mort accidentelle. Ce qui compte, c’est l’après, la deuxième heure du film, plus tendue : dans une ambiance chabrolienne — que Sandrine Bonnaire sait parfaitement suggérer —, la peur du qu’en-dira-t-on et les chantages petits-bourgeois finissent par engendrer une famille monstrueuse. Une autre sorte de prison, à vie. Fin décembre 1999, à Olloy, dans l'Ardenne Belge, un enfant disparaît. Tout le monde dans le village se met alors à suspecter son voisin de la disparitio ... |
UN AUTRE MONDE, Stephane Brize, 2021, Vincent Lindon, Sandrine Kiberlain (drame)@@@Philippe Lemesle, cinquante-sept ans, cadre dirigeant dans un groupe industriel américain, une femme, deux enfants, une belle maison, une belle voiture. Derrière l'image, la réalité. Depuis des années, les exigences de rentabilité demandées par l'entreprise lui pèsent, perturbant par ricochet l'équilibre familial. Lorsque Claire demande le divorce et que la maison-mère exige un nouveau plan de restructuration, la pression devient trop lourde. TÉLÉRAMA L’entreprise de Brizé, passionnante, raconte trois vérités : celle de l’ouvrier laissé sur le carreau par un dégraissage ; celle du leader syndical en lutte contre la fermeture de sa boîte ; et, aujourd’hui, celle du cadre sommé d’exécuter un « ambitieux plan d’économie » – en clair, virer dix pour cent de ses effectifs. Le coup de maître tient à ce qu’ils sont tous les trois interprétés par un seul et même acteur, Vincent Lindon, ce stupéfiant caméléon social, aussi juste en bourgeois accablé à grosse Volvo qu’il l’était, dans En guerre, en manifestant rageur à gilet fluo. Il endosse donc cette fois le costume-cravate de Philippe Lemesle, directeur d’une usine d’électroménager, que l’on rencontre précisément au moment où son monde bascule vers… quoi ? La solitude, déjà, puisque sa femme, Anne (Sandrine Kiberlain, de retour chez Brizé douze ans après Mademoiselle Chambon), a demandé le divorce. Le chagrin, aussi, quand leur fils (Anthony Bajon), étudiant en école de commerce, subit un burn-out qui le mène à l’hôpital psychiatrique. L’incompréhension, enfin, quand le groupe du dirigeant, largement bénéficiaire, lui impose de licencier pour envoyer un « message » positif aux actionnaires. Les ennuis, souvent, volent en escadron. Ils s’abattent d’un coup sur Philippe Lemesle, jusque-là grand gagnant d’un jeu qui pourrait s’appeler « Des chiffres et des êtres » mais qui, soudain, n’en comprend plus la règle. Le cinéaste le filme tantôt en réunion, encerclé, enfermé, tantôt isolé face à des colonnes de noms et de nombres, Stabilo à la main, en quête d’une impossible solution. Tout prêt, au départ, à « sacrifier cinquante-huit personnes pour en sauver cinq cents », le bon petit soldat s’imagine un temps en chevalier blanc mais l’absurdité du système finit par lui crever les yeux. À nouveau, Stéphane Brizé et son coscénariste Olivier Gorce excellent à pointer la violence – « Demain matin, y a une personne de l’atelier 1 qui passe sous un train, faudrait que ce soit surtout pas laquelle ? », interroge un cadre venu du siège – et le dévoiement de la langue managériale, où le terme « courage » revient en leitmotiv. De même, l’ensemble de la distribution, acteurs et non-professionnels mêlés, suscite l’admiration, avec une mention spéciale à l’ex-journaliste Marie Drucker, patronne coupante comme une lame. Mais, bizarrement, plus que le dénouement, un brin trop explicite, c’est une scène de vie conjugale qui nous chavire. Philippe et Anne y font visiter leur maison à un jeune couple en quête de foyer. On parle chauffage au sol, exposition sud, et la caméra, ignorant les acheteurs potentiels, s’attarde tour à tour sur les visages de Lindon et de Kiberlain pour y scruter l’indicible, la tendresse, les regrets. Juste la fin de leur monde. Philippe Lemesle, cinquante-sept ans, cadre dirigeant dans un groupe industriel américain, une femme, deux enfants, une belle maison, une belle voiture. Derrière l'im ... |