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LA PLAGE, Danny Boyle 1999, Leonardo DiCaprio, Virginie Ledoyen (societe)@@

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Richard, jeune Américain, amateur de sensations inédites a choisi l'Asie comme terrain d'élection, dans l'espoir d'y vivre des aventures fortes et exaltantes. Dans un hôtel miteux de Bangkok boudé par les touristes, il fait la connaissance d'un couple de Francais, Françoise et Etienne. Dans la nuit, un homme au regard halluciné fait irruption dans sa chambre et évoque une île secrète, une plage paradisiaque, où il aurait vécu plusieurs années au sein d'une petite communauté d'esprits libres.

TELERAMA
Son casting cinq étoiles et ses décors paradisiaques ne l’avaient pas protégé des critiques assassines, y compris à “Télérama”, à sa sortie en l’an 2000. Tentative de réhabilitation de l’œuvre la plus mal aimée du réalisateur de “Trainspotting”.

Au tournant du nouveau millénaire, en même temps qu’un parfum de fin du monde, on a vu fleurir beaucoup de films « sub-nietzschéens », mêlant pop culture rigolarde et existentialisme trash, reliquat eighties d’esthétique publicitaire et désordres mentaux (American Psycho, Les Lois de l’attraction, Fight Club…). De ceux-là, mais un peu à part, l’adaptation de La Plage (2000), best-seller d’Alex Garland (qui n’était pas encore le réalisateur estampillé A24 de Men et Civil War), n’avait alors pas vraiment connu de culte, encore moins de réhabilitation.

Déchiqueté façon Les Dents de la mer à sa sortie par une bonne partie de la presse, il n’avait pas davantage été épargné par Jean-Claude Loiseau de Télérama, qui voyait dans cet « authentique navet » une plage non pas de sable blanc, mais « mazoutée de niaiserie tenace »… Naïf, ce film extrêmement sévère avec l’utopie communautaire, le tourisme à l’occidentale ?

Il y a sûrement eu en ce temps-là une énorme méprise, due à l’imagerie de station balnéaire et au glamour d’un casting de beaux gosses croyant trouver leur bonheur dans la petite baie paradisiaque de Koh Phi Phi, en Thaïlande. Difficile en effet de ne pas y voir la carte postale : Leonardo DiCaprio, Guillaume Canet et Virginie Ledoyen jouissant d’un été permanent au cœur d’une petite colonie de hippies dirigée par Tilda Swinton… On a vu plus doloriste.

Mais candide ? Pas vraiment. Car le rêve tourne vite au cauchemar, sous l’intransigeance d’une communauté qui ne veut sacrifier sa discrétion et son bonheur à aucun prix. À la mystique du voyage, au développement personnel, aux beatniks, le film oppose une violence graphique, morale, un miroir coupant dans lequel se reflète l’horreur totalitaire et sacrificielle.

Curieux cinéaste que Danny Boyle, qui semble toujours prendre un plaisir sadique à filmer le revers de la médaille : plus ses personnages sont jeunes et cool, plus ils doivent payer. Du trekkeur influenceur de 127 Heures à la bande de potes toxicomanes de Trainspotting, en passant par les colocataires très smart de Petits Meurtres entre amis : Danny Boyle serait-il un cinéaste moraliste, à faire ainsi la leçon ?

Pas complètement, car à la manière de Fight Club (1999), La Plage semble être, plutôt qu’un jet acide, un geste romantique, ici le souvenir du paradis perdu, fantasmé, de la jeunesse de Danny Boyle lui-même. Ce qui rend le film, empli de jolis clins d’œil facétieux au cinéma de genre, éminemment attachant. Dans un récit certes parfois désarticulé, coloré d’un peu de kitsch mélancolique et générationnel (la musique de Moby), mais sûrement à dessein, à l’image de la fougue de cet âge-là : on n’a pas tous les jours 20 ans.

TELERAMA