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murat (jean-louis) - je me souviens (chanson fr) 2018

un album de Murat. Le vingt-deuxième au moins. On ne s’est pas précipité dessus comme on l’aurait fait sur une denrée rare… et finalement, la dégustation n’en fut que plus agré­able. Car là où l’on s’attendait à une énième digression de ses précédentes productions, là où on soupçonnait déjà une possible sécheresse mélodique, dissimulée sous un prétexte éculé du genre « ce n’est pas de la chanson, c’est de la recherche », nous avons croisé un homme en liberté. Et inspiré. Qui ­renoue avec des sons plus organiques que sur son précédent disque, et dessine un étrange portrait, le sien, « Francese » composite explorant des racines tant imaginaires que réelles. Pour ce faire, Murat évoque, invoque, mélange ; chante aussi bien les Indiens que les cow-boys, Marguerite de Valois que Silvana Mangano, ou même… le Murat de Napoléon, avec lequel il n’a, a priori, rien à voir. Brouille-t-il les pistes, au point de s’y perdre lui-même ? Se met-il au contraire au jour le plus honnêtement possible, attiré qu’il est par les grands espaces américains autant que par la sensuelle Italie ? Quoi qu’il en soit, on le reconnaît, dans sa sophistication et ses contradictions, ses interrogations (« qu’est-ce que tu nous chan­tes ? »), sa manière si personnelle de frotter l’ambition poétique à la bana­lité. Et s’il s’éloigne parfois des cons­tructions classiques en jouant sur les bruitages, les voix trafiquées, les ambiances sonores — allant jusqu’à intégrer sur un titre l’écho éphémère d’une fanfare —, il renoue aussi avec l’art si difficile des chansons limpides : Je me souviens et Rendre l’âme devraient met­tre tout le monde d’accord. Depuis 2004 et son Gagner l’aéroport, il n’avait plus approché la grâce de si près.