C'est ridicule. Me voilà dans ma petite chambre, moi âgé de vingt-huit ans, que personne ne connaît. Je suis assis ici et je ne suis rien. Et pourtant ce rien se met à réfléchir ; il réfléchit dans son cinquième étage, par un maussade après-midi parisien, et voici ce qu'il pense : est-il possible, pense-t-il, qu'on n'ait encore rien vu, rien su, rien dit qui soit réel et important ? Est-il possible qu'on ait eu des millénaires pour regarder, pour réfléchir, pour enregistrer et qu'on ait laissé passer ces millénaires comme une récréation dans une école, pendant laquelle on mange sa tartine et une pomme ? Oui, c'est possible.