Rome dans les années 1970. Dans la vague des changements sociaux et culturels, Clara et Felice Borghetti ne s'aiment plus, mais sont incapables de se quitter.
TELERAMA
À Rome, dans les années 1970, une femme trouve joie et tendresse auprès de ses enfants, tandis que son mari infidèle la traite comme une potiche. Coup de cœur pour cette bulle affective où l’on retrouve Penélope Cruz au top, entre rires et larmes.
Dès les premières scènes, c’est le coup de cœur… Parce qu’on est à Rome, dans les années 1970, et parce que Clara et ses trois enfants mettent la table en dansant. Dans la joie produite par cette chorégraphie avec assiettes plates, un mot de passe nous est donné : la complicité. Elle est spontanée, décontractée, mais les sentiments les plus forts s’y engouffrent, l’amour partagé, la plénitude protectrice. Cette vibration intense est au cœur de L’immensità, qui explore la relation de la mère avec l’aînée de la fratrie, Adri. Deux femmes coupées en deux.
La resplendissante Clara, merveilleusement joueuse, est en effet aussi une potiche comme les aime son époque, une poupée que son mari sort en société pour parader et trouver de nouvelles maîtresses… Combien de temps la maman comblée pourra-t-elle cacher qu’elle est une épouse malheureuse ? Et combien de temps Adri devra-t-elle cacher que, si elle se donne des airs de garçon manqué, c’est parce qu’elle en est vraiment un, même si elle est née fille ? Sous la loi du mari ou sous la loi du père, chacune a un combat à mener. Mais elles préfèrent s’évader en regardant les émissions de variétés à la télévision, au risque de perdre pied dans la réalité…
On devine les origines autobiographiques de cette chronique familiale si singulière et si expressive. Que le réalisateur Emanuele Crialese (Respiro, Terraferma) soit bel et bien devenu l’homme qu’il se sentait être n’est cependant qu’un détail, une information que son film ne donne d’ailleurs pas. L’important est dans la parenthèse qu’ouvre le bonheur partagé avec une mère de rêve, idéalement et subtilement interprétée par Penélope Cruz. Pour raconter cette bulle affective qui est à la fois intimiste et immense, le film aussi se coupe en deux. Il développe des scènes spectaculaires, parfois même grandioses, comme celle où les enfants se perdent dans le sous-sol d’une villa, symbole d’une recherche de l’identité souterraine… Mais il reste aussi au plus près des visages, pour faire vivre des portraits poignants, le temps d’un arrêt sur un moment éphémère et inoubliable de la vie.