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POLISSE, Maiwenn 2011; Karin Viard, JoeyStarr (policier)@@

À Paris, Melissa, une photographe, vient effectuer un reportage sur la Brigade de protection des mineurs, la BPM. Incestes et pédophilie, maltraitance, enlèvement, prostitution adolescente, misère ordinaire, mariage forcé. En contrepoint à ces tragédies quotidiennes s'enchaînent aussi des événements personnels pour des flics sous tension, entre fous rires et coups de gueule. Fred et Melissa tombent amoureux ; Nadine divorce et puis regrette ; l'anorexie et la solitude d'Iris s'aggravent.

TELERAMA
Grâce à son sens du détail insolite et à son talent inné pour le désordre organisé, toutes les scènes, collectives ou intimes, des plus dures aux plus cocasses, percutent. Un petit Africain est arraché à sa maman, qui veut le sauver de la misère, pour être placé dans un foyer. Il hurle. Longtemps. La scène est insoutenable et ce malheur, brut, Maïwenn nous l’assène en pleine gueule.
Plus tard, une gamine est interrogée : pourquoi a-t-elle accepté de faire une fellation à plusieurs garçons ? Sa réponse est choquante et… hilarante ! Ce moment où la réalisatrice ose faire reposer le comique sur le sordide est un précipité révélateur de notre société où les jeunes, privés de repères, en viennent à mépriser, marchander leur propre corps. Polisse balance ainsi nombre de vérités : il n’est pas facile d’être flic quand on est femme et beur. Les flics sont, eux aussi, des parents aux entrailles nouées par la peur, car ils savent mieux que quiconque que le mal peut surgir à chaque coin de rue. Qu’un bébé peut être enlevé dans une crèche parce que la serrure de la porte d’entrée n’a pas été réparée. Et que la pédophilie s’exerce dans des appartements haussmaniens de 120 mètres carrés, où les pervers se croient intouchables… Alors, il faut décompresser : au cœur du film, comme une respiration, la brigade au grand complet, solidaire, danse à perdre haleine dans une boîte de nuit, sur Stand on the word, de Keedz, formidable morceau techno au chœur d’enfants… Se dépenser, suer le plus possible pour se laver de tous ces malheurs qui collent à la peau…

Dirigés comme des bêtes en cage, les acteurs sont tous impressionnants : Karin Viard, ­jamais aussi bien depuis longtemps ; Emmanuelle Bercot, qui a cosigné le scénario ; Marina Foïs, dure et fermée. Et puis il y a Joey Starr : il explose dans le rôle de Fred, le policier incapable de se résigner face au manque de moyens alloués à la brigade. D’entrée, son coup de gueule contre une adolescente ordurière impose l’identité du film : « Ferme ta gueule, on est à la police, ici, d’accord ? ! » beugle-t-il. D’accord !...

Reste Maïwenn, comédien­ne. On dira que le personnage qu’elle s’est donné est peu fouillé, un brin agaçant : une photographe bobo engagée pour prendre des clichés de la brigade et qui revient habiter les quartiers populaires en tombant amoureuse de Joey Starr. Elle ne se gâte guère, et c’était déjà le cas dans Le Bal des actrices. Démarche masochiste, mais généreuse : témoin étranger à ce groupe soudé, planquée derrière son objectif, elle endosse notre sentiment de voyeurisme, nous en absout. Et elle finit par faire totalement corps avec cette brigade. Com­me nous.