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LA DOUBLURE, Francis Veber 2005, Alice Taglioni, Daniel Auteuil, Gad Elmaleh (comique)@

Surpris par un paparazzi avec Eléna, sa maîtresse, célèbre mannequin, le milliardaire Pierre Levasseur tente d'éviter un divorce sanglant en inventant un mensonge invraisemblable. Il profite de la présence sur la photo d'un passant, François Pignon, pour affirmer à sa femme qu'Eléna n'est pas avec lui, mais avec Pignon, modeste voiturier. Levasseur, pour accréditer son imposture, est obligé d'envoyer la trop belle Eléna vivre avec Pignon.

TELERAMA
De film en film, Francis Veber a créé un personnage qui est vite devenu un caractère. François Pignon, ou la résistance poétique face à la brutalité du monde. Un inspecteur Clouseau pour la maladresse physique, qui avancerait dans la vie avec de l’âme plein les mirettes. Le premier Pignon fut Jacques Brel dans L’Emmerdeur, écrit par Veber et réalisé par Edouard Molinaro. Le plus célèbre – dans Les Compères et Les Fugitifs – fut Pierre Richard l’élastique, l’enjoué, le funambule, le gars à la faiblesse entêtée qui réussissait, par sa candeur, à résister au monde des grands. Depuis, Pignon est devenu grandiosement absurde (avec Jacques Villeret dans Le Dîner de cons) et angoissé moderne (avec Daniel Auteuil dans Le Placard). Son dernier avatar en date, dans La Doublure, convainc nettement moins.

Pignon, c’est en principe l’homme invisible, celui que les femmes, distraites ou pressées, ne songent même pas à regarder. Veber a eu beau coiffer Gad Elmaleh comme personne ne se coiffe plus depuis trente ans et l’habiller comme un sac, l’acteur reste si joli garçon qu’on a bien du mal à comprendre l’indifférence que lui manifeste la fille qu’il aime (Virginie Ledoyen). Qu’Alice Taglioni, qui incarne, elle, un top model naïf et sentimental, ne quitte pas le salaud qui lui sert d’amant pour ce joli jeune homme tendre et discret est un des nombreux « mystères » du scénario de Francis Veber.

Donc, le François Pignon 2006 est voiturier pour un restaurant chicos. Il est fou amoureux d’une jeune libraire et flanqué d’un ami (Dany Boon) qui squatte chez lui. Le hasard le fait passer dans une rue où un paparazzi guette la rencontre d’un homme d’affaires millionnaire (Daniel Auteuil) avec le fameux top model. Pour éviter le scandale et, surtout, le divorce avec sa richissime épouse (Kristin Scott Thomas), l’homme d’affaires engage Pignon pour jouer le rôle de l’amant de sa maîtresse. Pour devenir sa doublure.

Jolie idée, annonciatrice d’un film efficace et d’un triomphe de plus. Car tout le monde aime Francis Veber. Lui, d’abord ; le public, ensuite. Seuls les critiques, ces éternels ronchons, détonnent dans le concert de louanges qui salue chaque film du « success man » français. Mais, jusqu’alors, s’ils mettaient en doute son talent de réalisateur, ses détracteurs étaient bien forcés de concéder au cinéaste une habileté à jongler avec les figures imposées du vaudeville.

Pas d’habileté, cette fois. Son intrigue posée, Veber semble s’en désintéresser. Les personnages n’évoluent pas. Les gags sont rares. Aucune surprise. Pas même le désir de saisir, en filigrane, l’air du temps. Dans Le Placard, probablement son film le plus démoli par la presse, il se livrait, mine de rien, à une critique rigolote de notre société – la vie en entreprise et le politiquement correct. Ici, il se contente d’opposer mollement deux clans figés : les riches, contemplés avec une condescendance facile, et les pauvres, observés avec une (feinte) candeur agaçante.

Dans Le Placard, les seconds rôles étaient réussis. Ici, ils semblent tous surnuméraires. Même l’épouse de l’homme d’affaires, qui devrait occuper le cœur de l’intrigue, ne semble exister que pour huiler les rouages d’une vieille pièce de boulevard. Seuls s’incarnent un peu les rapports tendus, fielleux, qu’entretient Daniel Auteuil avec son avocat, esclave maso (Richard Berry, parfait). Veber se retrouve soudain dans son élément, le duo de mecs, prenant son temps pour suggérer, à coups de répliques vachardes, la dérision que lui inspirent ces fantoches…

On sait le cinéaste obsédé par la rapidité, le rythme, le tempo. À raison : rien n’est plus assommant que la mollassonnerie des comédies françaises actuelles. Mais, curieusement, plus il accélère ici ses scènes, plus il ralentit son film qui, à la fin, tourne à vide… On aurait aimé qu’il s’attarde plutôt sur ce couple impromptu, le charmant top model et le gentil voiturier, forcés de cohabiter ensemble. On aurait aimé sentir naître entre eux le trouble, la complicité, la tendresse – toutes ces jolies choses que réussissait si bien à exprimer, dans La Garçonnière, Billy Wilder. Un dingue de rythme aussi, mais qui savait, lui, quand c’était nécessaire, donner du souffle, de la vie, à un film…

Distribution
Gad Elmaleh : François Pignon
Alice Taglioni : Elena Simonsen
Daniel Auteuil : Pierre Levasseur
Kristin Scott Thomas : Christine Levasseur
Richard Berry : Maître Foix
Virginie Ledoyen : Émilie
Dany Boon : Richard
Michel Jonasz : André Pignon, le père de François
Michel Aumont : le médecin
Laurent Gamelon : Paul
Patrick Mille : Pascal
Michèle Garcia : Louise Pignon, la mère de François
Philippe Magnan : Berman
Jean-Yves Chilot : Hervé
Irina Ninova : Marie
Philippe Beglia : le maître d'hôtel
Noémie Lenoir : Karine
Sandra Moreno : la secrétaire de Levasseur
Jean-Pol Brissart : Mauricet
Philippe Brigaud : Monsieur Hervé
Alexandre Brik : Ken
Thierry Humbert : le paparazzi
Paulette Frantz : la mère de Richard
Thierry Nenez : Perrache
Karl Lagerfeld : lui-même