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HIGH LIFE Uma Nova Vida, Claire Denis 2018, Juliette Binoche

(taille reelle)
Des criminels condamnés à mort sont envoyés dans l'espace hors du système solaire en échange d'une peine moindre. Leur mission est d'extraire d'un trou noir une énergie vitale pour la Terre.

TELERAMA
Pour
Un vaisseau flotte à la dérive, au-delà du Système solaire. Les membres de l’équipage sont des criminels condamnés à mort, à qui ce voyage expérimental a été proposé comme une alternative à leur peine. Même la scientifique (Juliette ­Binoche), figure d’autorité, partage l’infamie avec les autres. Ce lourd passé, ajouté à l’ambiance de déréliction, rappelle Solaris, d’Andreï Tarkovski (1972), où des cosmonautes perturbés rencontrent, dans leur station spatiale, d’étranges visiteurs — leurs proches, y compris disparus —, les renvoyant à leur sentiment de culpabilité.

Mais High Life est un Solaris où la sexualité aurait supplanté la métaphysique. Seul principe de vie, à la place de l’âme : la pulsion. Le protocole originel d’expériences sur la reproduction dans l’espace a viré à d’humiliants rituels érotiques infligés aux hommes par la scientifique. Entre l’onanisme organisé, l’abstinence rebelle de l’un et la violence sexuelle des autres, la cinéaste retrouve tout son art transgressif. L’évidence que les personnages ne pourront plus revenir sur Terre lui permet aussi d’interroger, comme in vitro, les tabous et la morale — chancelante en l’occurrence. Dans le dernier mouvement, l’enfant née à bord est devenue une jeune fille, qui n’a connu et ne connaîtra qu’un seul homme, son père… Ce tête-à-tête en huis clos, à la fois autosuffisant et plein de désirs impossibles, fait culminer le trouble, avec le néant en ligne de mire. Tableau stylisé d’une humanité au pied du mur, sans idéal ni espérance, High Life est un vrai film de mise en scène, totalement fascinant. — Louis Guichard

Contre
Le concept, fumeux, l’emporte sur l’organique. On ne voit que les coutures, les intentions, la volonté de faire sens : en un mot l’ambition, colossale, de revisiter le space opera, genre propice aux délires extrêmes. Claire Denis déconstruit le récit pour mieux dissimuler l’absence d’enjeux narratifs — ça commence par la fin et progresse ensuite à coups de retours en arrière. Persuadée que son talent et ses provocations gore ou sexuelles suffisent à tenir le spectateur en éveil, la cinéaste ne se donne pas la peine de construire ses personnages. Juliette Binoche, qui brillait dans le précédent film de Claire Denis, Un beau soleil intérieur, se livre à un numéro grand-guignolesque de Dr Frankenstein de la PMA et chamane du sperme, sans parvenir à être autre chose que ridicule. A l’image du film tout entier.