Leïla, mère de famille, se bat au quotidien pour tenter de sauver le couple qu'elle forme avec Damien, un mari bipolaire. Ils s'aiment profondément, mais les effets de la maladie se ressentent durement dans leur quotidien. Il tente de poursuivre sa vie avec elle sachant qu'il ne pourra peut-être jamais lui offrir ce qu'elle désire.
TELERAMA
Le bonheur d’une famille se délite sous l’effet de la bipolarité du père. Un film intense, inspiré par les souvenirs d’enfance du cinéaste. Que peut l’amour contre plus fort que lui ? C’est, davantage que la maladie mentale en elle-même, la question centrale du long métrage présenté en compétition à Cannes, possiblement le meilleur de Joachim Lafosse à ce jour. Le réalisateur belge s’intéresse depuis ses débuts à l’éclatement de la famille ( Nue propriété en 2006, L’Économie du couple en 2016) mais aussi à la manipulation et à la toxicité ( Élève libre en 2008, À perdre la raison en 2012). Peut-être parce qu’il s’inspire ici de ses souvenirs d’enfance (son père est bipolaire) sans les tenir trop à distance, il signe avec Les Intranquilles un film moins clinique, moins froidement acéré qu’à l’accoutumée. Sa mise en scène, pourtant, reste impitoyable dans l’art de dépeindre le délitement du clan et l’usure des sentiments.
Sous des cieux apparemment radieux, les joies les plus simples se colorent ainsi de malaise, de danger, voire de honte pour Amine (formidable Gabriel Merz Chammah, petit-fils d’une certaine Isabelle Huppert). Les hauts et les bas de Damien transforment le quotidien en grand huit infernal et Leïla, en infirmière malgré elle. L’amoureuse sensuelle vire vigie et virago, répétant à son fils « Ne t’inquiète pas, ça va aller » comme un mantra auquel personne ne croit. Quand Damien exulte, elle se rembrunit, et vice versa. Imprévisible, fiévreux ou abattu, Damien Bonnard excelle en homme luttant pour ne pas se dissoudre dans le lithium, et Leïla Bekhti, constamment sur le qui-vive, bouleverse en victime collatérale. Que peut l’amour ? Tout, rien, pas assez.