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vermeer (johannes) - dame buvant avec un gentleman
La composition est, par de nombreux aspects, typique des scènes de genre développées à Delft par Pieter de Hooch au début des années 1650, et l'idée de séduction qui s'en dégage se double, selon toute vraisemblance, d'une portée moralisante.
une femme en rouge assise devant une table, en train de finir un verre de vin. Un homme, debout derrière elle, tient un pichet de la main droite, posé sur la table.
Le Verre de vin (en néerlandais : Het glas wijn) est une huile sur toile de Johannes Vermeer. Ce tableau, de 66,3 centimètres de haut et de 76,5 centimètres de large, a été réalisé, selon les experts, entre 1658 et 16592, ou un peu plus tard, vers 1661-16623.

Vermeer est âgé d'environ 27 ans quand il peint Le Verre de vin. Selon Walter Liedtke, « aucune analyse s'attachant aux conventions artistiques ne peut parvenir à suggérer la beauté pure et l'extraordinaire raffinement d'un tableau tel que Le Verre de vin, qui peut être considéré comme la première de ses œuvres de complète maturité ».
Depuis 1901, le tableau appartient aux collections de la Gemäldegalerie de Berlin (Stiftung Preußischer Kulturbesitz).

Contrairement aux habitudes de Vermeer, le premier plan est laissé libre de tout meuble, rideau ou objet, et les personnages apparaissent en pied, au niveau du plan médian8, dans la partie gauche de la composition. Le sol présente un damier de carreaux ocre-orangé et noirs qui occupe approximativement le tiers inférieur de la toile.

La relation entre les personnages et les différents éléments de la composition laissent supposer une histoire d'amour à la fois imminente et douteuse. La double thématique de la musique et du vin, abondamment traitée par la peinture de genre hollandaise de l'époque, évoque immanquablement une scène de séduction.
La jeune fille s'est élégamment habillée le matin pour recevoir son maître de musique. La leçon — le maître au cistre, la jeune femme à la voix — vient d'être interrompue, comme en témoignent, posés sur la chaise, l'instrument et le recueil ouvert. La distance entre les deux chaises, ainsi que la place des partitions sur la table, à l'angle le plus éloigné de la jeune fille, suggèrent cependant que la musique n'a pas suffi à rapprocher les cœurs. L'homme profite donc d'une pause pour tenter une nouvelle manœuvre, en souhaitant que le vin réussisse là où la musique a échoué — ou parachève ce que la sérénade a initié. Et si le premier verre s'avère insuffisant à enivrer la jeune fille16, il s'apprête, avec une mâle assurance, à la resservir, en ne la quittant pas du regard.
Et l'obscurité dans laquelle est baignée cette peinture renverrait au caractère privé, intime de l'amour, ainsi qu'au moyen de réaliser les désirs charnels — ce que la pleine lumière ne permettrait pas....doublée d'une portée moralisatrice La scène ne revêt cependant aucune signification érotique ostensible, et se colore bien plutôt d'un message moralisateur en faveur de la vertu.

La scène semble prise sur le vif, comme en témoignent les légères perturbations qui créent une tension entre ordre et désordre, et supposent un mouvement antérieur au moment fixé sur la toile, ainsi que son prolongement.

À la différence de Pieter de Hooch, Vermeer définit avec précision les textures et les matières : satin rouge moiré de la robe de la jeune femme et bandes de brocart, par opposition à la matité du drap kaki de la cape de l'homme, bois doré du cadre, moelleux des coussins de velours, velouté du tapis sur la table, poli du bois tourné, des pieds de la table ou des montants de la chaise, transparence du verre, de la fenêtre comme du verre de vin, etc. L'extraordinaire rendu des différentes matières est notamment perceptible dans le coin supérieur gauche de la toile, qui met côte à côte le verre de la fenêtre, le bois du cadre, le plâtre du mur et le voile translucide du rideau bleu.
La transparence du satin, par exemple, a été obtenue par une première couche de vermillon, le seul rouge opaque et lumineux disponible du xviie siècle, recouverte, une fois sèche, d'une très fine pellicule de rouge garance mêlé à de l'huile — selon une technique qui donne au rouge feu une profondeur que le mélange des deux couleurs sur la palette n'aurait pas produit.

Autres effets virtuoses, caractéristiques de Vermeer, l'attention aux effets de lumière. Les reflets sont notés sur le verre de vin. Les jeux d'ombre et de lumière viennent modeler les volumes, du pichet, du visage de l'homme, ou encore, par de légères couches de bleu translucides, de la coiffe de la jeune fille. Les murs blancs enregistrent également les variations lumineuses, que ce soit le blanc éclatant qui dessine une verticale à gauche du cadre de la première fenêtre, ou le blanc mêlé de bleu qui remonte en triangle à droite du rideau tiré, ou encore les nuances de bleus qui animent le plâtre du mur du fond, dont la restauration de la toile effectuée en 1999 a confirmé toute la délicatesse21. Le tableau confirme en outre la technique « pointilliste » de Vermeer, qui figure par des gouttelettes de peinture plus claires les points de lumière accrochés aux surfaces, sur le manche du cistre et les têtes de lion sculptées, sur le velours du dossier de la chaise21, et qui ne sont pas sans rappeler La Laitière.

Le tableau dans l'œuvre de Vermeer
Comparativement aux tableaux précédents, le pinceau de Vermeer dans Le Verre de vin s'adoucit, tandis que les vêtements et les visages sont dépeints avec des lignes de contours très douces. Seuls le tapis servant de nappe sur la table et la vitre de la fenêtre ont donné lieu de la part de l'artiste à des détails fins, et des coups de pinceau linéaires.
La maîtrise de la lumière et la précision de la composition, complexe sans être confuse, n'est pas sans annoncer les chefs-d’œuvre de la maturité, et leurs exquises simplifications.

Le Verre de vin 1658 et 1662
Huile sur toile 66,3 × 76,5 cm
Âge d'or de la peinture néerlandaise
Localisation
Gemäldegalerie, Berlin
Numéro d’inventaire 912C