LA LOI DU SILENCE, Alfred Hitchcock, Mongomery Clift
Caché sous une soutane, le sacristain d'une église de la ville de Québec tue un avocat qu'il s'apprêtait à voler. Surpris par le prêtre de la paroisse, le père Logan, il lui avoue le meurtre dans le secret du confessionnal. Mais les soupçons de la police se portent rapidement sur le prêtre.
TELERAMA
Tourné entre le machiavélique Inconnu du Nord-Express et l’impeccable Crime était presque parfait, La Loi du silence paraît un peu faible dans la filmographie du maître du suspense… Pourtant, même dans une œuvre mineure, on retrouve çà et là, par petites touches insidieuses, le meilleur de Hitchcock. Ici, en l’occurrence, il s’amuse avec l’identité sexuelle de ses héros : Montgomery Clift, d’une beauté diaphane, ne quitte jamais sa robe de prêtre, tandis que la jeune femme qu’il a aimée jadis arbore une coupe à la garçonne, que le réalisateur s’ingénie à filmer très souvent de dos, jouant sur l’ambiguïté sexuelle du couple. L’homme d’Église reçoit la confession d’un criminel et ne peut, soumis à la loi du silence, le dénoncer à la police, même quand il devient lui-même le suspect du crime. Il est alors dans la frustration permanente, ne pouvant parler ni se défendre, il doit se maîtriser contre toute émotion, faisant preuve d’une (f)rigidité imperturbable. Face à lui, Karl Malden incarne le flic dans toute sa puissance virile, rendant Montgomery Clift encore plus efféminé. Quand il s’agit d’avouer publiquement son ancienne histoire d’amour, il laisse la parole à sa maîtresse, ce qui nous vaut des flash-back très romantiques, à la limite du roman-photo avec musique sucrée. Nous n’aurons jamais la vision masculine de cette romance…
Hitchcock travaille ses cadrages comme dans un film expressionniste : un crucifix, un clocher ou une scène de la Passion est toujours dans le plan quand apparaît Montgomery Clift, filmé en contre-plongée. Il est l’image même de la droiture ecclésiastique, expiant un péché qu’il n’a pas commis, mais dont il se sent coupable, à l’aune d’un passé un peu trouble et face à une population prompte à le juger. Un curé aussi beau, c’est forcément louche… Hitchcock est décidément d’une perversité diabolique.