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UNE HISTOIRE D AMOUR ET DE DESIR, Leyla Bouzid 2021, Sami Outalbali, Aurélie Petit, Zbeida Belhajamor (societe)@@



UNE HISTOIRE D AMOUR ET DE DESIR, Leyla Bouzid 2021, Sami Outalbali, Aurélie Petit, Zbeida Belhajamor (societe)@@
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UNE HISTOIRE D AMOUR ET DE DESIR, Leyla Bouzid 2021, Sami Outalbali, Aurélie Petit, Zbeida Belhajamor (societe)@@ ()

Ahmed, 18 ans, français d'origine algérienne, a grandi en banlieue parisienne. Sur les bancs de la fac, il rencontre Farah, une jeune tunisienne pleine d'énergie fraîchement débarquée à Paris. Tout en découvrant un corpus de littérature arabe sensuelle et érotique dont il ne soupçonnait pas l'existence, Ahmed tombe très amoureux d'elle et bien que littéralement submergé par le désir, il va tenter d'y résister.

TELERAMA
Français d’origine algérienne, Ahmed découvre l’amour à la fac… mais se l’interdit. Un film pudique sur la sexualité et le déterminisme social.

L'éducation sentimentale et érotique d’un garçon, menée par une fille et filmée par une réalisatrice, telle est la promesse rare de ce deuxième long métrage. Où le romanesque s’ancre dans une réalité précise et complexe : Ahmed, 18 ans, Français d’origine algérienne, a toujours vécu en banlieue parisienne, tandis que Farah arrive de Tunis pour ses études supérieures — ils font connaissance à la fac de lettres modernes. Elle est aussi exubérante qu’il est réservé, mais leur attirance mutuelle s’impose d’emblée. Jusqu’au soir où leur première étreinte manquée fait apparaître un abîme d’incompréhension entre eux.

La sensualité immédiate de la mise en scène (les peaux aimantent la caméra) doit alors composer, comme Farah, avec les obstacles accumulés par Ahmed contre lui-même. Il se donne le droit d’aimer platoniquement, silencieusement, mais pas celui de convertir ses sentiments en gestes. Une histoire d’amour et de désir, donc, mais où les deux termes s’opposent. La cinéaste effleure alors un sujet de société — la propension des jeunes hommes à limiter leur sexualité à la consommation de vidéos pornos. Mais le mouvement du film est à la fois plus intime et plus épique. Le portrait d’Ahmed ne cesse de se nuancer. Dans le quartier où il a grandi et où il côtoie encore des voisins de son âge, durs et désœuvrés, une idylle estudiantine ne peut en aucun cas s’avouer. À l’université, le garçon est si verrouillé, si inhibé qu’il refuse longtemps de faire l’exposé devant les autres qu’on exige pourtant de lui. Puis son histoire familiale tragique et celle de ses aïeux éclairent peu à peu sa personnalité.

Que le cours où l’on retrouve régulièrement Farah et Ahmed porte sur la littérature arabe érotique du Moyen Âge donne au récit sa saveur et son style. Ces textes, présentés par une prof au charisme subtil, rappellent une culture arabe aujourd’hui méconnue, éclipsée, voire cachée, exaltant les corps et les caresses. Ils scandent le film et parfois le débordent par leur flot poétique, de même qu’ils invitent l’étudiant troublé à un nouveau langage, celui des amants. Reste à savoir si l’on peut encore devenir quelqu’un d’autre à 18 ans, au temps du déterminisme implacable. Leyla Bouzid conduit ce suspense avec pudeur, mais sans pruderie, de la première image, le corps d’Ahmed nu, de dos et flou, jusqu’à la dernière : son visage net, en gros plan.


(edit IPTC)