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LA FEMME DE TCHAIKOVSKI, Kirill Serebrennikov 2022 (drame sentimental bio)@@@



LA FEMME DE TCHAIKOVSKI, Kirill Serebrennikov 2022 (drame sentimental bio)@@@
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LA FEMME DE TCHAIKOVSKI, Kirill Serebrennikov 2022 (musique bio)@@@ ()

Antonina Miliukova, jeune femme brillante, épouse le compositeur Piotr Tchaïkovski. L'amour qu'elle lui porte tourne à l'obsession et la jeune femme est rejetée. Consumée par ses sentiments, Antonina accepte de tout endurer pour rester auprès de lui.

TELERAMA
De la passion à la folie, la vie de l’épouse du compositeur, brûlante de désir pour un mari qui la repoussait. Nouveau coup d’éclat du Russe dissident.

Une vraie femme parvient à ses fins avec n’importe quel homme ! » entend-elle siffler à ses oreilles. Soit un supplément de cruauté par-dessus son supplice : un amour dévorant et non partagé pour son époux, l’illustre compositeur Piotr Ilitch Tchaïkovski. Et ce depuis leur première rencontre, à Moscou, dans les années 1870. Voilà mises en lumière (et en ombres), par Kirill Serebrennikov, l’histoire méconnue d’Antonina, sa vie à la fois gâchée et embrasée. Elle était jeune, volontaire et pas spécialement pauvre avant de croiser le musicien. Elle est morte en 1917, dans un asile. Le génie ombrageux (dont l’œuvre n’est jamais au centre du film) n’avait répondu à sa déclaration d’amour épistolaire que dans le but de contracter un mariage de façade. S’en est suivi, pour elle, un enfer de frustration, d’humiliation, d’aveuglement, de déni. Un peu comme si l’homme aimé religieusement, fanatiquement par l’Adèle H., de François Truffaut (et fille de Victor Hugo), presque à la même époque – la fin du XIXe siècle –, avait été non seulement indifférent mais homosexuel.

Serebrennikov, Russe dissident, désormais exilé à Berlin, ouvertement gay, endosse avec frénésie le point de vue de la damnée. Il met sa virtuosité tourbillonnante, sa démesure baroque au service de cette chute, qui est aussi une résistance. Antonina est méprisée en tant que femme dans une époque et une société patriarcales (milieu artistique compris), un univers d’hommes, homosexuels ou non. Elle est rejetée en tant qu’épouse et modeste amatrice de musique. Mais sa puissance tient à la force de son désir pour Tchaïkovski. Un désir tout sauf éthéré, nourri d’admiration mais violemment sexuel, et qui tend vers l’infini au fur et à mesure que le compositeur se dérobe, puis cherche à se débarrasser de sa femme.

Comme l’héroïne truffaldienne, Antonina noircit du papier avec ses tourments et sa passion, mais elle n’est jamais montrée comme une figure de pureté, bien au contraire. Une fois interdite d’approcher son mari, elle tiendra même des propos antisémites à l’égard de l’entourage de Tchaïkovski. À l’avocat supposé la défendre et devenu son amant pis-aller, elle lancera sèchement : « Tu n’es rien pour moi. » Elle abandonnera à leur naissance les enfants qu’ils auront ensemble. Le monde dépeint par Serebrennikov est, en soi, entaché, corrompu, malade. Les mouches tournoient autour du compositeur vénéré du Lac des cygnes. Les rues de Moscou évoquent une cour des miracles où des indigents agonisent en hurlant, préfigurant de sort de l’héroïne. Une fatalité implacable domine les êtres humains, propension au malheur, à la violence et à la souffrance, dans laquelle on peut aisément lire une vision de la Russie éternelle, donc contemporaine. Les plans-séquences en surplomb des personnages disent ce destin qui les dépassent.

Œuvre au noir, leçon de ténèbres, La Femme de Tchaïkovski n’offre jamais une once de la chaleur et la douceur de Leto (2018), le chef-d’œuvre du cinéaste. Mais il brille par son ampleur tragique, la fièvre de sa mise en scène, l’énergie fantasmatique (à la gloire du corps masculin) qui s’y déploie et la puissance de l’interprétation. Dans le rôle du compositeur, un acteur d’origine américaine, Odin Lund Biron, sait donner à sa première apparition, avec son léger accent, cette singularité extrême qui déclenche une cristallisation amoureuse. Alyona Mikhailova aurait, elle, mérité un prix d’interprétation au dernier Festival de Cannes, où le film fut présenté, tant elle rejoint, par son intensité de chaque instant, les plus grandes tragédiennes du cinéma. Au-delà des circonstances de cette histoire, Serebrennikov livre une étude de la passion comme dérangement et dérèglement absolus, laissant en suspens une question taraudante : Antonina aurait-elle brûlé d’un tel feu si Tchaïkovski ne l’avait pas repoussée d’emblée et toujours ?

Lorsqu'Antonina Milioukova rencontre Piotr Tchaïkovski, le plus célèbre des compositeurs russes, elle tombe littéralement sous son charme. L'apprentie pianiste entre au conservatoire de Moscou et se rapproche de plus en plus du compositeur. Avec le temps, elle obtient ce qu'elle souhaite, une union avec celui qu'elle aime éperdument sans recevoir d'amour en retour. En effet ce dernier rejette la jeune femme malgré tous les sentiments qu'elle lui porte car sa priorité reste la musique et la composition. Malgré sa situation dramatique, Antonina décide de rester à ses côtés, quitte à endurer le pire...


(edit IPTC)