Alexandre SOLJENITSYNE - L'Archipel du goulag (essai philosophique) (1973)
L'Archipel du Goulag (en russe Архипелаг ГУЛаг) est un livre d'Alexandre Soljenitsyne qui traite du système carcéral et de travail forcé mis en place dans l'Union soviétique. Cet essai d'investigation littéraire selon les mots de Soljenitsyne) en trois volumes écrit à partir de témoignages de prisonniers ainsi que de sa propre expérience des camps soviétiques. Il est publié en 1973, plusieurs années après le démantèlement du Goulag proprement dit. C'est son œuvre la plus connue.
Goulag (Glavnoe oupravlenie ispravitelno-trudovykh Lagerei, ou Direction principale des camps de travail) est un acronyme utilisé par l'administration soviétique pour désigner des camps de travaux forcés. Le terme « archipel » est utilisé pour illustrer la multiplication des camps et leur diffusion dans tout le pays, comme un ensemble d'îlots connus seulement de ceux condamnés à les peupler, à les construire ou à les relier. Cela fait également allusion au « goulag de Solovki », créé dès 1923 sur les Îles Solovetski.
Travaillant dans le plus grand secret, Soljenitsyne commença la rédaction de son livre dès la fin de sa peine au Goulag comme prisonnier politique. Soljenitsyne hésita longtemps quant à la pertinence de cette publication ; la police secrète précipita sa décision. Il le fit publier à l'étranger en 1973 après que le KGB eut confisqué une copie de son manuscrit. « Le cœur serré, je me suis abstenu, des années durant, de publier ce livre alors qu'il était déjà prêt : le devoir envers les vivants pesait plus lourd que le devoir envers les morts. Mais à présent que, de toute façon, la sécurité d'État s'est emparée de ce livre, il ne me reste plus rien d'autre à faire que de le publier sans délai. »
Les récits détaillés de L'Archipel du Goulag évoquent les incarcérations des « ennemis du peuple », des prostituées, des criminels, de simples citoyens raflés pour répandre la terreur et l'obéissance aveugle devant le nouveau pouvoir. Soljenitsyne décrit des procès bâclés et joués d'avance, le transport des prisonniers, le régime d'oppression remontant à l'absorption d'une partie de l'appareil sécuritaire tsariste par les bolchéviks menés par Lénine pour maintenir la révolution pendant la guerre civile et qui s'intensifia sous Staline jusqu'en 1953.
L’ouvrage a longtemps circulé en URSS sous forme de samizdat jusqu’à sa publication en 1989 dans la revue Novy Mir. Paradoxalement, il a été plutôt mal accueilli par de nombreux opposants soviétiques au régime qui y dénonçaient une description apocalyptique d'un système, le Goulag, qui était alors pour l'essentiel démantelé, et dont la critique risquait de reléguer au second plan celle des vicissitudes encore réelles du système soviétique alors en vigueur1.
Sa lecture fait aujourd'hui partie du cursus des lycéens russes