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dessay (nathalie) agnes jaoui helene noguerra - les eaux de mars (carlos jobim)(folklore bresil) 2014@@


Un pas, une pierre, un chemin qui chemine
Un reste de racine, c'est un peu solitaire
C'est un éclat de verre, c'est la vie, le soleil

Ce 19 mai au soir, au Théâtre des Bouffes du Nord à Paris, c'est un projet plus étonnant que la soprano présente avec Rio Paris, entourée de l'actrice Agnès Jaoui, la chanteuse Helena Noguerra et la guitariste Liat Cohen. Quatre femmes, quatre copines, quatre nanas, qui ont choisi pour terre d'élection musicale le Brésil, ce continent des possibles où la musique, comme l'amour, « n'a jamais connu de loi » – en tout cas pas celle des genres ségrégatifs qui divisent « savant » et « populaire ».
Au centre de la piste, la robe rouge de la guitariste Liat Cohen est un soleil noir autour duquel tourneront les nostalgies et fugaces espérances de compositeurs aussi différents que le grand Villa-Lobos, Carlos Jobim, Baden-Powell, Bonfa, Gismonti, Pascual, Zequinha de Abreu, Azevedo, Marques Pinto, Figueiredo… Blonde platine, cheveux tirés en queue-de-cheval, Natalie Dessay a opté pour une robe longue en strass épais qui dénude les épaules et habille le cou d'un collet monté.
Sous les dehors décontractés et plaisantins d'un bon mot adressé au public, on sent une certaine appréhension. On se demande d'ailleurs comment la voix claire de la soprano lyrique va se mêler aux timbres de ses comparses, le velours sombre et mordoré d'Helena Noguerra, la raucité viscérale et jouissive d'Agnès Jaoui.

Les arrangements réalisés par Rafi Kadishon sont de toute beauté, qui habillent les voix avec le charisme d'un maître couturier. Chacune d'entre elles est mise en valeur dans le rapport à l'autre. A la grâce naturelle d'Helena Noguerra, non dépourvue d'ironie ou de mordant (Chega de saudade, de Carlos Jobim), répond la voix blessée d'Agnès Jaoui, un don d'émotion à fleur de peau, tour à tour caressée, enlacée, brutalisée (Manha de carnaval, extrait d'Orfeo Negro, de Luiz Bonfa). Quant à Natalie Dessay, caméléon têtu et généreux, elle incarne le désir de se fondre dans une polyphonie qui la guérirait de sa folie solitaire. La guitare de Liat Cohen est à la musique ce qu'un coeur battant est à la vie.
Rio Paris. Au Théâtre impérial de Compiègne (Oise), le 22 mai à 20 h 45. Theatre-imperial.com ; à l'Opéra-Théâtre de Limoges, le 3 juin à 20 h 30. Operalimoges.fr ; à l'Opéra de Rouen, le 15 juin à 16 heures. Operaderouen.fr. Rio Paris 1 CD Erato.

Marie-Aude Roux (Le Monde)


Un pas, une pierre, un chemin qui chemine
Un reste de racine, c'est un peu solitaire
C'est un éclat de verre, c'est la vie, le soleil
C'est la mort, le sommeil, c'est un piège entrouvert
Un arbre millénaire, un noeud dans le bois
C'est un chien qui aboie, c'est un oiseau dans l'air
C'est un tronc qui pourrit, c'est la neige qui fond
Le mystère profond, la promesse de vie
C'est le souffle du vent au sommet des collines
C'est une vieille ruine, le vide, le néant
C'est la pie qui jacasse, c'est l'averse qui verse
Des torrents d'allégresse, ce sont les eaux de Mars
C'est le pied qui avance à pas sûr, à pas lent
C'est la main qui se tend, c'est la pierre qu'on lance
C'est un trou dans la terre, un chemin qui chemine
Un reste de racine, c'est un peu solitaire
C'est un oiseau dans l'air, un oiseau qui se pose
Le jardin qu'on arrose, une source d'eau claire

Une écharde, un clou, c'est la fièvre qui monte
C'est un compte à bon compte, c'est un peu rien du tout

Un poisson, un geste, c'est comme du vif argent
C'est tout ce qu'on attend, c'est tout ce qui nous reste
C'est du bois, c'est un jour le bout du quai
Un alcool trafiqué, le chemin le plus court
C'est le cri d'un hibou, un corps ensommeillé
La voiture rouillée, c'est la boue, c'est la boue

Un pas, un pont, un crapaud qui croasse
C'est un chaland qui passe, c'est un bel horizon
C'est la saison des pluies, c'est la fonte des glaces
Ce sont les eaux de Mars, la promesse de vie
Une pierre, un bâton, c'est Joseph et c'est Jacques
Un serpent qui attaque, une entaille au talon

Un pas, une pierre, un chemin qui chemine
Un reste de racine, c'est un peu solitaire
C'est l'hiver qui s'efface, la fin d'une saison
C'est la neige qui fond, ce sont les eaux de Mars
La promesse de vie, le mystère profond
Ce sont les eaux de Mars dans ton coeur tout au fond

Un pas, une " ... pedra é o fim do caminho
E um resto de toco, é um pouco sozinho ... "
Un pas, une pierre, un chemin qui chemine
Un reste de racine, c'est un peu solitaire...

Paroliers : Antonio Carlos Jobim / Georges Moustaki / Tom Jobim